Alors que le Nigeria souffre de la violence du groupe terroriste islamiste Boko Haram, le pape exprime son soutien aux évêques : « Avec persévérance et sans vous décourager, avancez sur la voie de la paix ! Accompagnez les victimes ! Secourez les pauvres ! Éduquez les jeunes ! Soyez les promoteurs d’une société plus juste et solidaire ! »
Le pape a en effet adressé une lettre, ce 2 mars 2015, à la Conférence épiscopale nigériane, dans une société confrontée « à des formes nouvelles et violentes d’extrémisme et de fondamentalisme, sur fond ethnique, social et religieux » : « Je voudrais vous assurer que je suis proche de vous et de ceux qui souffrent. Tous les jours, je vous porte dans ma prière. »
Lettre du pape François :
Chers frères dans l’épiscopat,
Tandis qu’avec toute l’Église nous accomplissons notre chemin de carême vers la résurrection du Seigneur, je désire vous faire parvenir, chers archevêques et évêques, mes salutations fraternelles, que j’étends à la communauté chrétienne bien aimée, confiée à votre sollicitude pastorale. Je désire aussi vous faire partager quelques réflexions au sujet de la situation actuelle de votre pays.
Le Nigeria, connu comme le « géant de l’Afrique », avec plus de 160 millions d’habitants, est destiné à jouer un rôle de premier plan non seulement sur ce continent, mais dans le monde entier. Ces dernières années, il a expérimenté une forte croissance sur le plan économique et il est devenu, sur la scène internationale, un marché d’un grand intérêt que ce soit pour ses ressources naturelles ou pour son potentiel commercial. Il est désormais considéré officiellement comme la plus grande économie africaine. Il s’est aussi distingué en tant qu’interlocuteur politique par son engagement dans la résolution de situations de crise sur le continent.
Parallèlement, votre nation a dû se confronter à de graves difficultés, entre autres des formes nouvelles et violentes d’extrémisme et de fondamentalisme, sur fond ethnique, social et religieux. Un grand nombre de Nigérians ont été tués, blessés et mutilés, séquestrés et privés de tout : de leurs proches, de leur terre, des moyens de subsistance, de leur dignité et de leurs droits. Beaucoup n’ont plus pu retourner chez eux. Croyants, qu’ils soient chrétiens ou musulmans, ils ont en commun une fin tragique, de la main de personnes qui se proclament religieuses, mais qui abusent de la religion pour en faire une idéologie qui se plie à leurs propres intérêts d’oppression et de mort.
Je voudrais vous assurer que je suis proche de vous et de ceux qui souffrent. Tous les jours, je vous porte dans ma prière et je redis ici, pour vous réconforter et vous encourager, les paroles consolantes du Seigneur Jésus qui doivent toujours résonner dans nos cœurs : « Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix » (Jn 14,27).
La paix – vous le savez bien – n’est pas seulement l’absence de conflit ni le résultat de quelque compromis politique, ni un fatalisme résigné. La paix, pour nous, est un don qui vient d’en-haut, c’est Jésus-Christ lui-même, le prince de la paix, celui qui des deux peuples en a fait un seul (cf. Éph 2,14). Et seul celui qui a la paix du Christ dans son cœur, comme horizon et style de vie, peut devenir un artisan de paix (cf. Mt 5,9).
En même temps, la paix est un engagement quotidien, courageux et authentique pour favoriser la réconciliation, promouvoir des expériences de partage, jeter des ponts de dialogue, servir les plus faibles et les exclus. En un mot, la paix consiste à construire une « culture de la rencontre ».
C’est pourquoi, je veux ici vous exprimer mes sincères remerciements parce qu’au milieu de tant d’épreuves et de souffrances, l’Église au Nigeria ne cesse de témoigner l’accueil, la miséricorde et le pardon. Comment ne pas évoquer les prêtres, les religieux et les religieuses, les missionnaires et les catéchistes qui, au prix de sacrifices indicibles, n’ont pas abandonné leur troupeau, mais sont restés à leur service de bons et fidèles annonciateurs de l’Évangile. À eux, en particulier, je voudrais exprimer ma proximité et leur dire : Ne vous lassez pas de faire le bien !
Pour eux, nous remercions le Seigneur, comme pour les nombreuses personnes de toute extraction sociale, culturelle et religieuse qui, avec une grande détermination, s’engagent concrètement contre toutes les formes de violence et en faveur d’un avenir plus sûr et plus juste pour tous. Ils nous offrent des témoignages émouvants qui, comme nous l’a rappelé le pape Benoît XVI à l’issue du synode pour l’Afrique, montrent « la puissance de l’Esprit qui transforme les cœurs des victimes et de leurs bourreaux pour rétablir la fraternité » (Africae Munus, 20).
Chers frères dans l’épiscopat : avec persévérance et sans vous décourager, avancez sur la voie de la paix (cf. Lc 1,79) ! Accompagnez les victimes ! Secourez les pauvres ! Éduquez les jeunes ! Soyez les promoteurs d’une société plus juste et solidaire !
De tout cœur je vous donne la bénédiction apostolique et je vous demande de la transmettre aux prêtres, religieux et religieuses, missionnaires, catéchistes, fidèles laïcs et surtout aux membres souffrants du Corps du Christ.
Que la résurrection du Seigneur puisse être porteuse de conversion, de réconciliation et de paix pour le peuple tout entier du Nigeria ! Je vous confie à Marie, Reine de l’Afrique. Priez aussi pour moi.