À compter du 13 février 2023, les sanctuaires dédiés à la Vierge de Guadalupe en Espagne et au Mexique sont désormais jumelés. L’objectif est de faire rayonner plus amplement la Reine de l’Hispanité et Impératrice des Amériques, apparue à un petit Indien, Juan Diego, sur la colline de Mexico en l'an 1531. Le Pape François a rédigé un message pour l’occasion, ce lundi 13 février 2023, rappelant l’importance de la dévotion mariale dans la communion et la réconciliation.
Message du Saint-Père pour le jumelage des sanctuaires
de Guadalupe (Espagne et Mexique) :
A Son Excellence le Révérend
Monseigneur Francisco Cerro Chaves
Archevêque de Tolède
Cher frère,
C'est avec une grande joie que je désire vous faire parvenir mon salut à l'occasion du jumelage des deux sanctuaires dédiés à la Bienheureuse Vierge Marie, sous le titre de Notre-Dame de Guadalupe. Je vous prie de l'étendre, en premier lieu, à Son Eminence le Cardinal Carlos Aguiar Retes, Archevêque du Mexique, et, avec lui, à tous les Evêques, prêtres, consacrés et fidèles qui ont voulu se mettre en ce jour aux pieds de la Très Sainte Vierge, comme un seul Peuple saint de Dieu.
Marie, notre Mère, est toujours pour son Peuple un lien de communion. L'Écriture et la tradition apostolique nous le montrent en convoquant les apôtres et la communauté autour d'Elle, dans un climat de prière. Ainsi l'exprime saint Luc dans les Actes des Apôtres : "Tous, intimement unis, se consacraient à la prière, en compagnie de quelques femmes, de Marie, la mère de Jésus, et de ses frères" (1,14). Cette expérience fondatrice de la première communauté chrétienne transcende les époques et les lieux, et la Mère de Jésus, de manière simple, continue de nous appeler. Cela s'est exprimé dans de nombreux endroits du monde par l'invitation à construire un temple qui soit une maison avec des portes toujours ouvertes pour tous, une maison de prière et de communion.
Aujourd'hui, le doux Nom de Marie les convoque, plus précisément une invocation millénaire qui déjà dans sa racine étymologique nous parle de métissage, de rencontre avec Dieu et avec les hommes. Métissage parce que les savants ne parviennent pas à s'entendre si nous devons lire le titre "Guadeloupe" en arabe, en latin ou en nahuatl. Mais il est curieux que ce qui pourrait se poser comme un conflit puisse en réalité se lire comme un clin d'oeil de l'Esprit Saint qui fait entendre son message d'amour à chacun dans sa langue. Ainsi, en arabe, le mot pourrait sonner "rivière cachée", comme l'était cette source d'eau vive que Jésus promet à la Samaritaine, cette force de la grâce qui, même en temps de rejet et d'incompréhension, maintient l'Eglise en vie (cf. Jn 4,10). En tant que pasteurs, cette allusion doit être pour nous un aiguillon, chercher toujours dans l'autre ce fleuve caché de grâce, cet Amour de Dieu qui en fait un trésor inestimable. Tout changerait si, comme la Vierge, nous pouvions voir dans l'autre ce secret caché, combien d'échecs et de conflits nous éviterions.
Cependant, en se mêlant au latin, le mot nous parlerait d'un "fleuve de loups" et, en ce sens, d'un havre de paix pour ceux qui sont troublés par leurs propres péchés, par la violence, par tant de guerres internes et externes qui font de l'homme un loup pour l'homme. C'est le même fleuve caché de la grâce qui, dans le dialogue avec Jésus, nous montre notre réalité (v. 29), nous ouvrant à l'espérance. Comme saint François, dans sa célèbre rencontre avec le loup, la Vierge Marie nous interpelle à nouveau pour être un ferment de communion et de réconciliation entre Dieu et les hommes, en encourageant tant de fidèles qui s'approchent du sanctuaire à cette fin.
Enfin, en s'associant à la racine mexicaine, notre Dame de Guadalupe se proclame comme celle qui vainc le serpent, avec une évocation du protoévangile de la Genèse. L'Immaculée est ainsi la vraie mère de tous ceux qui vivent ; de ceux qui ont été convoqués aujourd'hui dans ce sanctuaire, avec leurs pasteurs, pour proclamer leur foi dans le Fils de Dieu, en Celui qui, en faisant toutes choses nouvelles, a réconcilié avec lui le monde. Je vous encourage à faire jaillir dans les coeurs des hommes et des femmes de notre temps ce fleuve d'eau vive qui saute jusqu'au ciel, pour donner à Dieu un culte en Esprit et Vérité (cf. vv. 14, 23).
Chers frères et soeurs, à chaque moment historique, dans chaque culture, l'Evangile, demeurant toujours le même, s'enrichit de signification. Loin d'être écarté, il inclut chaque personne qui l'accueille. Demandons à Dieu que, dans chaque temps et chaque lieu où Marie, notre Mère, nous convoque, nous rendions témoignage de cette union intime dont seul l'Esprit peut être l'artisan.
Que Jésus vous bénisse et que la Sainte Vierge vous protège. Et s'il vous plaît, priez pour moi.
Fraternellement,
Francois.