Ce vendredi 3 Décembre 2021, le pape François a envoyé un message aux participants à la VIIe Conférence Rome MED Dialogues, promue par le Ministère italien des Affaires étrangères et de la Coopération internationale, et par l’Institut d’Etudes de politique internationale, et qui se tient du 4 au 6 décembre 2021. Il faut « empêcher que le processus de mondialisation ne dégénère dans la mondialisation de l’indifférence », a déclaré le pape.
Message du pape François :
Mesdames et Messieurs,
Je vous salue chaleureusement, vous tous qui participez à la VIIe Conférence Rome MED Dialogues, organisée chaque année par le Ministère italien des Affaires étrangères et de la Coopération internationale et par l’Institut d’Etudes de Politique internationale, dans le but de repenser l’approche traditionnelle de la région méditerranéenne et de chercher des réponses nouvelles et communes aux défis importants qu’elle pose.
Bien que les royaumes et les empires de la région méditerranéenne appartiennent désormais au passé, la mare nostrum continue d’avoir une importance géopolitique centrale, y compris en ce siècle. La Méditerranée est un lieu de frontières, et donc de rencontre, de trois continents, qui non seulement sont baignés par elle, mais qui s’y touchent ils sont donc appelés à coexister.
L’interconnexion centrée sur cette mer nous montre, et pas seulement de manière symbolique, combien toute la planète est une grande maison commune et que le sort d’un pays ne peut être indépendant de celui des autres pays. D’ailleurs le concept même d’indépendance est en train d’évoluer dangereusement. Si, dans le passé, il signifiait surtout la légitime revendication d’autonomie par rapport à l’ingérence ou à l’occupation d’Etats extérieurs, à l’époque contemporaine, l’indépendance prend le sens d’ « indifférence » et de « désintérêt » à l’égard du sort des autres peuples. Il est nécessaire que la politique et la diplomatie s’interrogent et fassent tout leur possible pour empêcher que le processus de mondialisation ne dégénère dans la mondialisation de l’indifférence.
Cet engagement doit être encore plus sincère aujourd’hui, alors que nous avons des preuves de plus en plus évidente – de la crise climatique à la pandémie – que non seulement les Etats mais plus encore les continents ne peuvent continuer de s’ignorer mutuellement.
Si cela est vrai en général, c’est d’autant plus vrai dans la région méditerranéenne. Toutes les ressources et tout le potentiel de cette mer exigent une approche nouvelle, non pas individuelle et égoïste, mais conjointe et partagée entre les pays qui la bordent, mais également entre ceux qui ne la bordent pas mais qui sont concernés par les politiques méditerranéennes à divers titres. Une approche capable de détendre les multiples conflits régionaux qui se développent en surface, dans les profondeurs et sur les bords de la mer, et qui s’étendent de la mer sur les continents.
Parmi les différents problèmes qui se concentrent sur la Méditerranée – et qui exigent une vision politique clairvoyante – la question migratoire est extrêmement urgente, question qui m’a toujours tenu à cœur et qui a motivé mon premier voyage apostolique, sur l’île de Lampédouse, en 2013. Les évènements de ces dernières années confirment toujours plus qu’une intervention efficace ne peut venir que d’un effort conjoint non limité aux pays frontaliers, mais partagé également par les continents respectifs auxquels ils appartiennent. Personne ne doit être laissé seul dans la gestion de cet énorme problème. Tous doivent se sentir responsables, parce que tous sont en réalité responsables, comme nous le rappelle au début de la Bible, la question adressée par Dieu à Caïn : « Où est ton frère ? » (cf. Gen. 4, 9).
Le phénomène migratoire nous montre une fois encore que tout est lié et nous avertit qu’une solution stable requiert une approche capable de tenir compte des nombreux aspects qui sont liés à celui-ci et que les dialogues de cette conférence peuvent mettre en lumière.
Je voudrais en outre souligner que la Méditerranée et au centre de l’attention constante de l’église. Précisément pendant les jours de votre conférence, je serai engagé dans un voyage apostolique à Chypre et en Grèce. Je voudrais aussi rappeler la rencontre fructueuse de l’année dernière à Bari, « Méditerranée frontière de paix », organisée par la Conférence épiscopale italienne, à laquelle ont participé les évêques d’au moins 20 pays bordant le mare nostrum et qui sera suivie l’année prochaine d’une autre rencontre à Florence, en cours d’organisation.
J’aime penser que non seulement ces rencontres ecclésiales, mais également vos dialogues sur la Méditerranée, peuvent s’inspirer des « colloques méditerranéens » inaugurés par Giorgio La Pira dans les années 50 et 60 du siècle dernier, qui avaient beaucoup rapproché les rives opposées de la mer en inaugurant la politique du dialogue autour de ce que La Pira considérait dans une vision de foi comme « un grand lac de Tibériade ».
C’est avec cet espoir que je vous souhaite à tous un congrès fructueux, en vous assurant de ma prière et en invoquant la bénédiction de Dieu.