Au cours de la messe célébrée ce vendredi matin à Sainte-Marthe, François a de nouveau adressé ses pensées aux malades, aux personnes âgées seules, aux familles qui n'ont plus rien pour vivre, et il a exprimé sa gratitude à ceux qui s'occupent d'eux. Dans son homélie, le Saint-Père a parlé du courage de garder le silence face à la folie destructrice du diable. C'est ce que Jésus a fait, et c'est ce qu'il faut faire face aux petites tentations, telles que les bavardages.
Au début de cette messe diffusée en direct depuis la chapelle de la maison Sainte-Marthe, François a d’abord invité les fidèles à remercier Dieu:
«Ces jours-ci, on a appris que tant de gens commencent à se faire du souci pour les autres de manière plus générale, et à penser aux familles qui n'ont pas assez pour vivre, aux personnes âgées seules, aux malades à l'hôpital ; ils prient et essaient d'obtenir de l'aide... C'est un bon signe. Remercions le Seigneur d'avoir suscité ces sentiments dans le cœur de ses fidèles».
Texte de cette homélie :
«La première lecture (Sg 2, 1. 12-22) est presque une chronique (anticipée) de ce qui arrivera à Jésus. C'est une chronique qui a de l’avance, c'est une prophétie. Cela semble être une description historique de ce qui s'est passé par la suite. Que disent les impies ? «Attirons le juste dans un piège, car il nous contrarie, il s’oppose à nos entreprises, il nous reproche de désobéir à la loi de Dieu, et nous accuse d’infidélités à notre éducation. Elle est devenue pour nous une condamnation de nos pensées. Il est un démenti pour nos idées, sa seule présence nous pèse ; car il mène une vie en dehors du commun. Si le juste est fils de Dieu, Dieu l’assistera, et l’arrachera aux mains de ses adversaires». Réfléchissons à ce qu'ils ont dit à Jésus sur la Croix: "Si tu es le Fils de Dieu, descends ; qu'il vienne te sauver". Et puis, le plan d'action : mettons-le à l'épreuve "Soumettons-le à des outrages et à des tourments ; nous saurons ce que vaut sa douceur, nous éprouverons sa patience. Condamnons-le à une mort infâme, puisque, dit-il, quelqu’un interviendra pour lui.". C'est une prophétie, précisément, de ce qui s'est passé. Et les Juifs essayaient de le tuer, dit l'Evangile. Puis, ils ont également essayé de l'arrêter – nous dit l'Evangile - "mais personne n'a pu mettre la main sur lui, car son heure n'était pas encore venue".
Cette prophétie est trop détaillée; le plan d'action de ces personnes malfaisantes n'est que détails sur détails... n'épargnons rien, testons-le avec violence et tourment, et testons l'esprit d'endurance ... tenons le dans des pièges, piégeons-le, (pour voir) s'il tombe ... Ce n'est pas une simple haine, il n'y a pas de plan d'action – certainement malfaisant - d'une partie contre une autre : c'est autre chose. C'est ce qu'on appelle la fureur: quand le diable qui est derrière, toujours, à chaque tentative d’acharnement, essaie de détruire et n'épargne pas les moyens. Pensons au début du Livre de Job, qui est prophétique à ce sujet : Dieu est satisfait du mode de vie de Job, et le diable lui dit : "Oui, car il a tout, il n'a pas d’épreuves ! Mets-le à l'épreuve !" Et d'abord le diable lui prend ses biens, puis il lui prend sa santé, et Job n'a jamais, jamais été séparé de Dieu. Mais le diable, ce qu'il fait, c'est de l'acharnement. Toujours. Derrière toute fureur se cache le diable, pour détruire l'œuvre de Dieu. Derrière une dispute ou une inimitié, c'est peut-être le diable, mais de loin, avec des tentations normales. Mais quand il y a de la fureur, on ne doute pas: il y a la présence du diable. Et la fureur est subtile. Pensons à la façon dont le diable a été féroce non seulement contre Jésus, mais aussi dans les persécutions des chrétiens ; comment il a cherché les moyens les plus sophistiqués pour les conduire à l'apostasie, pour les éloigner de Dieu. C'est, comme on le dit dans le discours quotidien, c'est diabolique : oui, une intelligence diabolique.
Certains évêques d'un des pays qui ont souffert de la dictature d'un régime athée m'ont dit qu'ils allaient jusqu'à des détails comme celui-ci : le lundi après Pâques, les enseignants devaient demander aux enfants: "Qu'as-tu mangé hier ?", et les enfants disaient ce qu'il y avait pour le déjeuner. Et certains disaient: "Des œufs", et ceux qui disaient "des œufs" étaient alors persécutés pour voir s'ils étaient chrétiens parce que dans ce pays ils mangeaient des œufs le dimanche de Pâques. Jusqu'à ce point, de voir, d’espionner, là où il y a un chrétien, pour le tuer. C'est du harcèlement dans la persécution, et c'est le diable.
Et que fait-on dans les moments d'acharnement? On ne peut faire que deux choses: discuter avec ces gens n'est pas possible parce qu'ils ont leurs propres idées, des idées fixes, des idées que le diable a semées dans leur cœur. Nous avons entendu leur plan d'action. Que peut-on faire ? Ce que Jésus a fait: se taire. Il est frappant de lire dans l'Evangile que devant toutes ces accusations, toutes ces choses, Jésus s'est tu. Devant l'esprit de fureur, seulement le silence, jamais la justification. Jamais. Jésus a parlé, il a expliqué. Et quand Il a compris qu'il n'y avait pas de mots, le silence. Et en silence, Jésus a vécu sa Passion. C'est le silence des justes face à la ténacité. Et cela vaut aussi pour - appelons-les ainsi - le petit acharnement quotidien, quand l'un de nous sent qu'il y a un bavardage là, contre lui, et que l’on dit des choses et que rien ne sort ... Etre silencieux. Silence. Et supporter et tolérer la dureté du bavardage. Le bavardage est aussi un harcèlement, un harcèlement social: dans la société, dans le quartier, sur le lieu de travail, mais toujours contre l’autre. C’est un acharnement pas aussi fort que celui-là, mais c’est un acharnement, pour détruire l'autre parce qu'on voit que l'autre est dérange, perturbe.
Demandons au Seigneur la grâce de lutter contre le mauvais esprit, de discuter lorsque nous devons discuter; mais devant l'esprit d’acharnement, ayez le courage de vous taire et de laisser les autres parler. Y compris face à ce petit acharnement quotidien qu'est le bavardage: laissez-les parler. En silence, devant Dieu».
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Le Pape François a conclu cette messe par un temps d’adoration et la bénédiction eucharistique, en invitant les fidèles à faire la communion spirituelle. Voici la prière récitée par le Pape :
«Je crois, mon Jésus, que tu es réellement présent au très Saint Sacrement de l’autel. Je t’aime par-dessus toute chose et je désire ardemment te recevoir dans mon âme. Puisque je suis incapable de Te recevoir de façon sacramentelle, entre au moins spirituellement dans mon cœur. Je T’embrasse comme si Tu y étais déjà et je m’unis entièrement à Toi. Ne permets jamais que je sois séparé de Toi. Ainsi soit-il.»
Avant que le Pape ne quitte la chapelle, dédiée au Saint-Esprit, l’antienne mariale Ave Regina Caelorum a été chantée.