Le pape François a reçu en audience les participantes à la Rencontre de l’Union internationale des Supérieures générales (UISG), ce 10 mai 2019, dans la Salle Paul VI, à l’occasion de la XXIème Assemblée plénière, intitulée « Semeuses d’espérance prophétique », à laquelle ont participé environ 850 Supérieures générales provenant de 80 pays différents, du 6 au 10 mai, à Rome.
Discours du pape François :
Merci pour votre présence. J’ai préparé un discours, mais c’est ennuyeux de lire des discours ; je le remettrai donc à la présidente et elle vous fera parvenir le discours officiel. Je voudrais avoir un dialogue avec vous. Mais je voudrais auparavant reprendre deux ou trois petites choses qu’a dites la présidente.
Vous êtes plus ou moins 850, de 80 pays différents – c’est bigarré, comme rencontre. J’ai pensé à il y a trente ans, une rencontre de Supérieures générales, chacune avec son habit propre [elles rient] : toutes les mêmes à se cacher ! Aujourd’hui, chacune a l’habit qu’a choisi la congrégation : l’habit séculier, l’habit traditionnel, un habit plus moderne, comme cela, un habit national : la présidente… Je crois que nous donnerons le prix à la Supérieure des Sœurs de Jésus et Marie parce qu’elle est vraiment élégante avec son habit indien.
Merci beaucoup. Merci pour le chemin de mise à jour que vous faites. C’est risqué. Toujours. Grandir, c’est toujours risqué, mais c’est plus risqué de s’effrayer et de ne pas grandir. Parce que maintenant, tu ne vois pas la crise, le danger, mais à la fin tu resteras pusillanime, petite. Pas un enfant : un nourrisson, c’est pire. Merci pour votre travail.
Le problème des abus : le problème des abus ne se résout pas avec les solutions de l’Église d’un jour à l’autre. On a amorcé un processus. Hier, un autre document est sorti et ainsi, lentement, nous avançons dans ce processus. Parce que c’est quelque chose dont nous n’avions pas conscience depuis 20 ans jusqu’à maintenant et nous sommes en train d’en prendre conscience, avec beaucoup de honte, mais une honte bénie ! Parce que la honte est une grâce de Dieu. Et oui, c’est un processus mais nous, il faut que nous avancions, que nous avancions dans un processus, pas à pas, pour résoudre ce problème.
Certaines des organisations anti-abus n’ont pas été contentes de la rencontre de février [des présidents des Conférences épiscopales] : « Non, mais ils n’ont rien fait ». Je les comprends, parce qu’il y a de la souffrance dans tout cela. Et j’ai dit que si nous avions pendu cent prêtres abuseurs sur la Place Saint-Pierre, tout le monde aurait été content, mais cela n’aurait pas résolu le problème. On ne résout pas les problèmes de la vie avec des processus, mais en occupant des espaces.
Ensuite, les abus sur des religieuses sont un problème sérieux, un problème grave, j’en suis conscient. Ici aussi, à Rome, on est conscient des problèmes, des informations qui arrivent. Et pas seulement les abus sexuels sur des religieuses, mais aussi les abus de pouvoir, les abus de conscience. Nous devons combattre cela. Et aussi le service des religieuses : s’il vous plaît, le service oui, la servitude non. Tu ne t’es pas faite religieuse pour devenir la domestique d’un membre du clergé, non. Mais sur ce point, aidons-nous mutuellement. Nous pouvons dire non, mais si la supérieure dit oui… Non, tous ensemble : servitude non, service oui. Tu travailles dans les dicastères, dans celui-ci, dans cet autre, ou même dans l’administration d’une nonciature comme administratrice, un phénomène, c’est bien. Mais domestique, non. Si tu veux faire la domestique, fais ce que faisaient et ce que font les sœurs du père Pernet, de l’Assomption, qui font les infirmières, les domestiques dans les maisons de personnes malades : là oui, parce que c’est un service. Mais la servitude, non. Sur ce point, aidons-nous.
Ensuite, le diaconat féminin. Quand vous m’avez suggéré de créer une commission – parce que c’était votre idée – j’ai dit oui, j’ai créé la commission, la commission a bien travaillé, c’était des personnes capables, des hommes et des femmes théologiens, et ils sont arrivés jusqu’à un certain point, tous d’accord. Puis, chacun avait son idée, et ainsi… je remets à la présidente – je le remets officiellement aujourd’hui – le résultat du peu de choses sur lesquelles ils étaient tous d’accord. Ensuite, j’ai sur moi le rapport de chacun, personnel, l’un va plus loin, l’autre s’arrête à un certain point… Et il faut étudier tout cela, parce que je ne peux pas faire un décret sacramentel sans fondement théologique, historique. Mais il y a eu pas mal de travail. C’est peu, c’est vrai : le résultat n’a rien d’extraordinaire. Mais c’est un pas en avant. Certes, il y avait une forme de diaconat féminin au début, surtout en Syrie, dans cette zone-là ; je l’ai dit [lors de la conférence de presse] dans l’avion [pendant le vol de retour de Macédoine] : elles aidaient pour le baptême, dans les cas de dissolution de mariage, ce genre de choses… la forme d’ordination n’était pas une formule sacramentelle, c’était pour ainsi dire – c’est ce que me dit l’information, parce que je ne suis pas expert dans ce domaine – comme aujourd’hui la bénédiction abbatiale d’une abbesse, une bénédiction spéciale pour le diaconat aux diaconesses. On avancera parce que, dans peu de temps, je pourrai faire appeler les membres de la commission, voir comment ils ont avancé. Je remets officiellement le rapport commun ; je garde – si cela intéresse quelqu’un, dans ce cas je peux le lui donner – l’opinion personnelle de chacun. Mais ils ont fait un beau travail, et merci pour cela.
Ensuite, sur la fonction dans l’Église. Cherchez… Il faut que nous avancions sur la question : quel est le travail de la sœur dans l’Église, de la femme, et de la femme consacrée ? Et ne nous trompons pas en pensant que c’est seulement un travail fonctionnel… C’est possible, oui, que cela le soit, un chef de dicastère… À Buenos Aires, j’avais une chancelière : il y a beaucoup de femmes chancelières dans les évêchés… Oui, c’est possible, aussi fonctionnel ; mais l’important, c’est quelque chose qui va au-delà des fonctions, qui n’a pas encore mûri, que nous n’avons pas encore bien compris. Je dis « l’Église est au féminin », « l’Église est femme », et on dit : « Oui, mais c’est une image ». Non, c’est la réalité. Dans la Bible, dans l’Apocalypse, on l’appelle « l’épouse », elle est l’épouse de Jésus, c’est une femme. Mais sur cette théologie de la femme, il faut que nous avancions.
Voilà ce que je voulais vous dire. Et maintenant, nous avons 40 minutes pour poser des questions.