Le Pape François s’est rendu dans sa cathédrale, Saint-Jean-de-Latran, ce vendredi 25 octobre 2024 pour célébrer les 50 ans de la conférence sur les responsabilités des chrétiens dans la ville de Rome. Face aux difficultés des plus pauvres dans son diocèse, le Pape a réaffirmé le rôle des chrétiens. «Les pauvres sont la chair du Christ, et comme un sacrement, ils le rendent visibles à nos yeux», a-t-il insisté.
Discours du Saint-Père :
Chers frères et sœurs,
Je vous remercie d’être ici pour célébrer ensemble ce moment important pour le diocèse de Rome. Je salue les Autorités présentes et vous tous, ici en représentation de vos Communautés paroissiales et des réalités que vous servez. Je remercie également ceux qui ont œuvré pour nous rappeler le Congrès qui s’est tenu il y a 50 ans, connu sous le nom de « Congrès sur les maux de Rome ». Cet événement a marqué le parcours ecclésial et social de la Ville ; à cette occasion, l’Église de Rome a écouté les nombreuses souffrances qui la traversaient, invitant tous à réfléchir aux responsabilités des chrétiens face aux maux de l’Église et de la Ville, et éveillant la conscience civile, politique et chrétienne de beaucoup.
J’ai suivi les différentes étapes du travail mené cette année et j’ai écouté avec intérêt les synthèses et témoignages qui, malheureusement, nous montrent encore une réalité triste : aujourd’hui, les inégalités et la pauvreté frappent de nombreux habitants de la Ville. D’un côté, cela nous afflige ; de l’autre, cela nous montre combien le chemin à parcourir est encore long. Savoir qu’il y a des personnes sans-abri, des jeunes sans travail ni logement, des malades et des personnes âgées sans accès aux soins, des jeunes tombés dans la toxicomanie et d’autres dépendances modernes, et des personnes souffrant de troubles mentaux qui vivent dans l’abandon ou le désespoir. Ce ne sont pas de simples données statistiques ; ce sont des visages, des histoires de nos frères et sœurs qui nous interpellent : que pouvons-nous faire ? Voyons-nous en eux le visage du Christ souffrant ? Sommes-nous capables de le reconnaître ? Prenons-nous à cœur ces problèmes ? Que pouvons-nous faire ensemble ?
Partant de ces questions et de la Parole que nous avons entendue, je voudrais réfléchir avec vous sur trois aspects : annoncer aux pauvres la Bonne Nouvelle, recoudre la déchirure, et semer l’espérance.
1. Annoncer aux pauvres la Bonne Nouvelle
Les pauvres seront toujours avec nous. Ils sont la chair du Christ et, comme un sacrement, ils le rendent visible. Quand je confesse, je demande parfois à la personne : « Donnes-tu l’aumône ? » Si elle répond « Oui », je demande alors : « Et regardes-tu les yeux du pauvre ? Touche-tu sa main ? » Souvent, la réponse est non. Les pauvres ne sont pas un simple problème ou pire, un rebut ; ils sont nos frères, notre chair. Beaucoup ici se dévouent aux pauvres : les volontaires, les agents de Caritas, les associations locales, et tant d’autres personnes œuvrant dans le silence. La question de la pauvreté doit être une urgence pour l’Église, engageant chacun de nous. La proximité, la compassion, la tendresse sont des attitudes chrétiennes essentielles.
2. Recoudre la déchirure
L’image de la « déchirure » vient du titre de notre rencontre de ce soir. En effet, quelque chose s’est brisé ! Le tissu social, en raison des inégalités, connaît des fractures quotidiennes. Comment accepter que des familles n’aient pas de quoi manger alors que des quantités de nourriture sont gaspillées ? Ou que des personnes dorment dans la rue tandis que des espaces restent vides ? Une ville qui accepte ces contradictions est déchirée, tout comme notre planète. Il nous faut recoudre cette déchirure en bâtissant des alliances centrées sur la dignité humaine. Cela nécessite dialogue et collaboration avec les institutions, les associations, la famille, les générations. Pour recoudre, nous devons sortir de l’indifférence et nous impliquer ! Ensemble, nous pouvons emprunter des chemins nouveaux, vaincre le virus de l’indifférence et valoriser la doctrine sociale de l’Église.
3. Semer l’espérance
Cela est particulièrement important en vue du prochain Jubilé que j’ai voulu placer sous le signe de l’espérance chrétienne. J’ai invité chacun à réaliser des signes concrets d’espérance pour la paix, la vie humaine, les malades, les prisonniers, les migrants, les personnes âgées et les pauvres. Face à l’ampleur des problèmes, il est facile de dire « nous ne pouvons rien faire ». Mais l’espérance chrétienne est active, car elle repose sur la certitude que le Seigneur guide l’histoire. La Ville de Rome a connu des hommes et des femmes d’espérance qui n’ont pas hésité à agir. Aujourd’hui, à notre tour, nous devons lancer de nouveaux processus de bien, de solidarité. Osez, tous, dans la charité et la foi ! Le poète Charles Péguy dit que « L’espérance est une enfant qui traversera les mondes. »
Chers frères, chères sœurs, avançons avec espérance. Nous aussi, nous pouvons traverser les mondes de la pauvreté en apportant l’espérance de l’Évangile. Je prie pour vous, pour que vous soyez des témoins courageux de l’Évangile, capables d’annoncer la Bonne Nouvelle aux pauvres, de recoudre les déchirures et de semer l’espérance.
Et n’oubliez pas de prier pour moi, s’il vous plaît. Merci.