En accueillant les ministres et délégués participant au premier G7 consacré au sujet du handicap, qui s’est tenu en Italie du 14 au 16 octobre 2024, le Pape François a rappelé la nécessité d’inclure toutes les personnes dans la société, en particulier les personnes en situation de handicap ou «autrement capables». Face à «la culture du rejet», donner une place à tous «n'est pas une question d'assistance mais de justice et de respect de la dignité».
À la délégation de ministres participant au G7 sur l'inclusion et le handicap :
Mesdames et Messieurs les Ministres,
Mesdames et Messieurs les Délégués,
Excusez-moi pour l'heure tardive, il y avait beaucoup de choses aujourd'hui. Je vous salue avec gratitude et estime pour votre engagement à promouvoir la dignité et les droits des personnes handicapées. Un jour, en parlant des personnes handicapées, quelqu'un m'a dit : « Faites attention, nous avons tous une forme de handicap, vous savez ! » C'est vrai. Cette rencontre, à l'occasion du G7, est un signe concret de la volonté de construire un monde plus juste et inclusif, où chaque personne, avec ses propres capacités, peut vivre pleinement et contribuer à la croissance de la société. Au lieu de parler de « handicap », parlons de « capacités différentes ». Car chacun a des capacités. Je me souviens par exemple d'un groupe qui est venu ici, d'un restaurant, où les cuisiniers et le personnel étaient des jeunes avec des handicaps. Mais ils faisaient un excellent travail. Merci à Madame Alessandra Locatelli, Ministre du Handicap, pour avoir promu cette importante initiative. Merci.
Hier, vous avez signé la « Charte de Solfagnano », fruit de votre travail sur des thèmes fondamentaux tels que l'inclusion, l'accessibilité, la vie autonome et la valorisation des personnes. Ces thèmes rejoignent la vision que l'Église a de la dignité humaine. En effet, chaque personne est partie intégrante de la famille universelle et personne ne doit être victime de la culture du déchet, personne. Cette culture génère des préjugés et cause du tort à la société.
L'inclusion des personnes handicapées doit être reconnue comme une priorité par tous les pays. Ce mot « handicap » ne me plaît pas beaucoup. Je préfère l'expression « capacités différentes ». Malheureusement, dans certains pays, il est encore difficile de reconnaître la dignité égale de ces personnes (cf. Encyclique Fratelli tutti, 98). Rendre le monde inclusif signifie non seulement adapter les structures, mais aussi changer la mentalité, afin que les personnes handicapées soient considérées comme pleinement participantes de la vie sociale. Il n’y a pas de vrai développement humain sans la contribution des plus vulnérables. En ce sens, l'accessibilité universelle devient un objectif majeur, pour que chaque barrière physique, sociale, culturelle et religieuse soit levée, permettant à chacun de mettre en valeur ses talents et de contribuer au bien commun, à chaque étape de son existence, de l'enfance à la vieillesse. Cela me fait mal lorsque les personnes âgées sont rejetées à cause de la culture du déchet. Les personnes âgées sont une source de sagesse, et elles sont rejetées comme de vieilles chaussures.
Garantir des services appropriés aux personnes handicapées n'est pas seulement une question d'assistance – cette politique de l'assistanat : non, ce n'est pas cela – mais une question de justice et de respect de leur dignité. Tous les pays ont donc le devoir d’assurer les conditions nécessaires pour que chaque personne puisse se développer pleinement, dans des communautés inclusives (cf. Fratelli tutti, 107).
Il est donc important de travailler ensemble pour permettre aux personnes handicapées de choisir leur propre chemin de vie, les libérant des chaînes du préjugé. Rappelons-nous que la personne humaine ne doit jamais être un moyen, mais toujours une fin ! Cela signifie, par exemple, valoriser les capacités de chacun, en offrant des opportunités d'emploi dignes. Exclure quelqu'un de la possibilité de travailler est une grave forme de discrimination (cf. Fratelli tutti, 162). Le travail est dignité ; c'est l'onction de la dignité. Si vous enlevez cette possibilité à quelqu'un, vous lui enlevez sa dignité. Il en va de même pour la participation à la vie culturelle et sportive : c'est une offense à la dignité humaine de l'exclure.
Les nouvelles technologies peuvent également être des outils puissants d'inclusion et de participation, si elles sont accessibles à tous. Elles doivent être orientées vers le bien commun, au service de la culture de la rencontre et de la solidarité. La technologie doit être utilisée avec sagesse, afin de ne pas créer de nouvelles inégalités, mais de devenir un moyen de les réduire.
Le thème de l'inclusion doit enfin tenir compte des urgences de notre maison commune. Nous ne pouvons ignorer les crises humanitaires liées aux changements climatiques et aux conflits qui frappent de manière disproportionnée les personnes les plus vulnérables, y compris celles avec un handicap (cf. Encyclique Laudato si', 25). Nous avons le devoir de veiller à ce que les personnes handicapées ne soient pas laissées pour compte dans ces situations, qu'elles soient protégées et que leur assistance soit adaptée. Il faut construire un système de prévention et de réponse aux urgences qui prenne en compte leurs besoins spécifiques et garantisse que personne ne soit exclu de la protection et du secours.
Mesdames et Messieurs, je vois votre travail comme un signe d'espoir pour un monde qui trop souvent oublie les personnes handicapées ou, malheureusement, les rejette avant même qu'elles ne naissent : ils voient l'échographie et … renvoient au destinataire. Je vous encourage à poursuivre sur cette voie, inspirés par la foi et la conviction que chaque personne est un don, un don précieux pour la société. Saint François d'Assise, témoin d'un amour sans limites pour les plus fragiles, nous rappelle que la vraie richesse se trouve dans la rencontre avec les autres – cette culture de la rencontre que nous devons développer –, spécialement avec ceux que la fausse culture du bien-être tend à rejeter. Parmi ces rejetés, il y a les grands-parents : les grands-parents, les personnes âgées, dans les maisons de repos. C'est très triste. Il y a une belle histoire. On raconte que le grand-père vivait avec sa famille. Mais il avait vieilli et à table, il se salissait en mangeant… Un jour, le père fabriqua une table dans la cuisine et dit : « Le grand-père mangera dans la cuisine, ainsi nous pourrons inviter des gens. » Le temps passa et un jour le père rentra du travail et trouva son fils de cinq ans en train de jouer avec des planches. [Il lui demanda] : « Que fais-tu ? » – « Je fais une petite table. » – « Une petite table ? Pourquoi ? » – « Pour toi, papa. Quand tu seras vieux. » Ce que nous faisons aux personnes âgées, nos enfants nous le feront à nous. N'oublions pas cela. Ensemble, nous pouvons construire un monde où la dignité de chaque personne est pleinement reconnue et respectée.
Que Dieu vous bénisse et vous accompagne toujours, vous tous. Merci.