À l'occasion de cette journée promue par l'Onu et célébrée cette année ce vendredi 8 septembre 2023, le Souverain Pontife a envoyé un message à la directrice-générale de l'Unesco. "L’enseignement et l’apprentissage de l’alphabétisation ont un rôle central et primordial dans le développement de chaque personne" rappelle t-il, soulignant le rôle de l’alphabétisation dans l'établissement d'une culture de la paix et de sensibilisation à l'écologie intégrale.
Message du Saint-Père :
Madame Audrey Azoulay
Directrice générale de l’UNESCO
Paris
Sa Sainteté le Pape François salue tous les participants à la Conférence mondiale organisée au Siège de l’UNESCO, à Paris, dans le cadre de la célébration de la Journée Internationale de l’Alphabétisation 2023. Il exprime aussi sa proximité à toutes les personnes engagées dans diverses initiatives aux niveaux régional, national et local à travers le monde, pour marquer cette importante journée et réfléchir sur le thème qui nous est proposé cette année : « promouvoir l’alphabétisation pour un monde en transition : bâtir les fondations de sociétés durables et pacifiques ».
L’enseignement et l’apprentissage de l’alphabétisation ont un rôle central et primordial dans le développement de chaque personne, dans son insertion harmonieuse dans la communauté et dans sa participation active et efficace au progrès de la société. Le Saint-Siège estime tout particulièrement l’action de l’UNESCO en faveur d’une alphabétisation qui, tout en répondant à des besoins économiques et pratiques, vise fondamentalement à la promotion et à l’épanouissement de l’homme au niveau de sa vocation personnelle, sociale et spirituelle.
Les estimations du nombre de personnes dépourvues de compétences de base en alphabétisation restent toujours alarmantes et cela représente un obstacle pour le plein développement de leurs potentiels. Notre monde a besoin de l’expertise et de la contribution de chacun pour mieux répondre aux défis de notre temps. Parmi ces défis, je voudrais en mentionner trois :
1) Un premier défi est celui de l’alphabétisation à la paix. Dans un monde déchiré par des conflits et des tensions, il est fondamental de ne pas s’habituer au vocabulaire de la guerre et de la discorde. Comme on apprend à blesser avec des armes toujours plus ignobles, ainsi on peut renoncer à le faire. Comme on peut blesser une personne, un parent, un ami avec des mots durs et des gestes vindicatifs, ainsi on peut renoncer à le faire. Apprendre le lexique de la paix signifie redonner la valeur au dialogue, à la pratique de la gentillesse et du respect de l’autre. « Cet effort, vécu chaque jour, est capable de créer une cohabitation saine qui l’emporte sur les incompréhensions et qui prévient les conflits… Elle transfigure profondément le mode de vie, les relations sociales et la façon de débattre et de confronter les idées. Elle facilite la recherche du consensus et ouvre des chemins là où l’exaspération détruit tout pont » (Fratelli tutti, n. 224). D’autre part, la paix est ce que l’UNESCO elle-même s’est fixé de promouvoir dans les esprits et dans les cœurs des hommes, par l’éducation, la science, la culture et la communication. Elles demeurent les seules “armes” licites et efficaces à utiliser, en investissant plus de ressources et d’énergies pour construire l’espérance d’un avenir meilleur.
2) Un deuxième défi est celui de l’alphabétisation digitale. La révolution digitale et les développements de l’intelligence artificielle étendent à grande vitesse notre accès aux informations et notre capacité de nous connecter les uns les autres, au-delà de l’espace physique. Cependant un grand “fossé digital” persiste, avec des millions de personnes qui restent aux marges car elles sont privées d’accès non seulement aux biens essentiels mais aussi aux technologies de l’information et de la communication. En outre, sur les “autoroutes digitales”, beaucoup sont blessés par la division et par la haine. À cela s’ajoute le grave risque de livrer la vie humaine à la logique des dispositifs qui en décident la valeur. Pour prévenir une technologie mal gérée, hors contrôle et même nuisible pour la personne, il sera donc nécessaire que les politiques et les lois destinées à favoriser l’acquisition des compétences digitales ne négligent pas la plus vaste réflexion éthique sur l’usage des algorithmes, en orientant l’utilisation des nouvelles technologies vers un parcours responsable et humain.
3) Un troisième défi est celui de l’alphabétisation à l’écologie intégrale. Étant donné que la dégradation de la nature est étroitement liée à la “culture du rejet” qui modèle la coexistence humaine d’aujourd’hui, il s’agira de promouvoir avec patience et ténacité l’apprentissage de comportements plus sobres et solidaires qui, en plus d’avoir un impact direct sur le soin du prochain et de la création, peuvent inspirer à long terme une politique et une économie authentiquement durables pour la qualité de la vie, en faveur de tous les peuples de la terre et surtout de ceux qui se trouvent dans les situations les plus défavorisées et qui sont à risque.
Le Saint-Père adresse à toutes et à tous ses meilleurs vœux et vous assure de ses prières pour la fécondité des réflexions de cette journée, ainsi que pour le succès de votre engagement en faveur d’une alphabétisation qui vise à poser les fondations de sociétés durables et pacifiques. Sur vous, sur vos collaborateurs et sur tous les réseaux engagés dans l’alphabétisation, le Pape François invoque d’abondantes bénédictions de sagesse, de joie et de paix.
Cardinal Pietro Parolin
Secrétaire d’État de Sa Sainteté