Le Pape François a reçu, ce samedi 11 mars 2023, en audience au Vatican, une délégation de l’ONG espagnole Misión América qui célèbre son trentième anniversaire. Le Souverain pontife, les a invités à se focaliser sur l’image de Jésus envoyant son Église en mission, afin «qu’il soit pour vous un encouragement à exiger le respect de tout homme et de son droit à pouvoir discerner le chemin que Dieu lui trace», a affirmé François.
Aux membres de l'organisation "Misión América" :
Excellence Révérendaire,
Les révérends prêtres,
frères et sœurs :
J'ai appris que Mission America a 30 ans d'existence, ce qui nous rapproche de ce que la tradition appelait « l'âge parfait », c'est-à-dire l'âge du Christ à l'heure de sa Passion et de sa mort. En cette date significative, ils ont voulu visiter le Siège de Pierre, pour renouveler leur engagement envers l'Église universelle, concrétisé par leur travail en faveur des missions en Amérique et en Afrique. Je vous félicite et vous invite à ce que les trois années qui vous restent pour atteindre cet âge parfait, soient un chemin dans lequel vous pourrez continuer à progresser dans l'identification avec le Christ. Avec ce Christ qui nous a dit : « Comme le Père m'a envoyé à moi, je vous envoie aussi » (Jn 20,21), de sorte que vous puissiez ouvrir l'Église à la mission. L'Église doit sortir, elle doit être dans la rue. Ce texte de l'Apocalypse me dit beaucoup, dans lequel Jésus dit : « Je suis à la porte et j'appelle ». Si quelqu'un m'ouvre, je vais entrer, je serai avec vous, je dînerai (cf. Ap 3.20).
Le problème d'aujourd'hui est un peu différent. Jésus continue de frapper à la porte, mais tant de fois de l'intérieur pour que nous lui ouvrions la porte et le laissions sortir. Je pense que c'est le défi d'aujourd'hui. La mission. Ouvrir l'Église à la mission.
C'est évident dans votre travail que vous avez parcouru un chemin important. En fait, ils proposent quatre mots qui le définissent : visibilité, respect, volontariat et collaboration. Il est bon de les relire un peu à la lumière de cet évangile de la mission.
En effet sur la scène, à peine citée, Jésus, avant tout, leur montre «les mains et le côté» (v. 20). Cette image est intéressante, car d'une certaine manière, elle résume cette «manière» dans laquelle Jésus a été envoyé par le Père et nous envoie maintenant, donnant de la visibilité à la réalité de la douleur, du péché, de la mort, non pour condamner quiconque - nous, ce dévouement, nous l'avons très exercé pour condamner, et ce n'est pas le meilleur. Pas pour condamner quiconque, mais pour guérir, guérir l'humanité, en l'assumant dans sa propre personne. De même, en organisant des campagnes de sensibilisation pour faire connaître la réalité de l'Amérique latine, l'horizon ne peut être autre que de faire voir sur elle la main tendue du Christ, qui dans ses plaies nous offre le meilleur refuge.
Le texte biblique, comme vous le savez, continue avec l'épisode de saint Thomas. C'est une autre idée intéressante — mis à part la valeur théologique de l'histoire — le respect de l'autre, de son temps, de ses espaces. Jésus est toujours attentif au besoin, mais surtout à la personne dans son ensemble. Jésus respecte les gens. La vraie égalité, la vraie justice, n'est pas d'imposer un itinéraire unique et utilitaire pour tous, mais d'être capable d'accompagner chacun, dans sa liberté, dans son besoin, afin que chacun puisse répondre à l'appel de Dieu, au projet que Dieu a pour chacun de nous, selon son temps, son chemin, sa patience. Savoir attendre.
En outre, Jésus à cette occasion, selon l'Évangile de Jean, insuffle aux disciples l'Esprit Saint, leur donnant avec ce don la force, l'autorité pour accomplir la mission confiée. Les disciples de ce moment entrent comme à un autre niveau, plus actif, plus entreprenant, avec la force du Saint-Esprit, évidemment. De même, et en reconnaissant toujours que seule notre force est en Dieu, vous cherchez à pousser de l'Église espagnole cette vocation au volontariat — c'est l'une des plus belles choses que les sociétés ont ; le volontariat des laïcs, n'est-ce pas ? —. Volontariat actif, ce qui n'est rien d'autre que de soutenir par la prière, le travail, la solidarité ceux qui, poussés par le même Esprit, marchent dans le monde. Le bénévolat de soutien, de toute façon.
Enfin, un mot crucial pour comprendre l'immense cadeau de Jésus ressuscité : « Paix à vous » (v. 21), dit le Seigneur. Le cadeau de Jésus ressuscité est cette paix qu'il nous donne. Même s'il est impossible de saisir toute la signification de ce concept, vous le traduisez par collaboration. Collaborer en paix, que cela serve à la croissance. C'est quelque chose de beau, cela veut dire que la « paix » que Dieu établit avec nous et entre nous, transforme l'existence, se fait quotidiennement dans la marche de tous les jours, dans la recherche du bien, dans la diffusion de l'amour et de la concorde. Et cela crée de nouvelles réalités, en créant des ponts, en détruisant les peurs, en détruisant les rancœurs, ceux-là mêmes qui, comme le texte biblique le prouve, gardaient les disciples enfermés.
Cette image de Jésus qui envoie son Église à la mission, soit pour vous incite, pour donner de la visibilité aux plaies encore palpables dans son Corps mystique ; pour exiger et exiger le respect de chaque homme et son droit de pouvoir discerner le chemin que Dieu lui marque ; pour travailler et soutenir le travail de tous ceux qui ont été, comme nous, envoyés, collaborant avec tous les hommes de bonne volonté, à la gloire que le Seigneur nous a préparée, qui est que l'homme vive, comme dit saint Irénée (cf. Contre les hérésies, 4, 20,5-7).
Que Jésus vous bénisse. Merci, vraiment, pour ce que vous faites. Vous direz : « C'est peu, c'est très domestique ». Les petites choses, les choses domestiques sont celles qui persévèrent le plus, mais parfois les grandes choses ne durent pas.
Que la Vierge Sainte vous accompagne et ne perde pas la bonne humeur, s'il vous plaît. Continuez de prier pour moi.