"l’eucharistie est la pierre angulaire des séminaires"

Le Pape a reçu en audience 85 séminaristes de Madrid, accompagnés du cardinal Cobo Cano, archevêque de la capitale espagnole, en salle Clémentine du Palais apostolique, ce samedi 3 février 2024. Dans un discours remis, François leur a rappelé combien l'eucharistie est «l'inspecteur le plus vigilant» de la vie spirituelle.


Cher frère, chers séminaristes,

Nous nous trouvons ici grâce à un heureux hasard : Son Éminence Mgr José prendra possession de l'église de Santiago y Montserrat, qui unit dans ses saints titulaires la foi apostolique et l'amour de Marie qui caractérise toute l'Espagne.

Et Mgr José est en outre accompagné par son trésor le plus précieux, que vous êtes, son séminaire. De nombreux saints évêques d'Espagne se sont confrontés à la difficile réalité dans laquelle se trouvaient leurs églises, et ont pensé au séminaire comme le lieu où leur rêve pastoral pouvait prendre de solides racines et s'étendre. En fait, si nous voulons faire l’Église, Corps du Christ, c’est facile parce que, comme Dieu l’a dit à Moïse, nous devons simplement fixer le modèle que nous avons vu sur la montagne (cf. Ex 26, 30), le Christ transfiguré présent dans l’Eucharistie.

Il me vient à l'esprit un dicton de l'un de ces saints évêques, que vous connaissez probablement, il voulait « un séminaire où l'Eucharistie serait : dans l'ordre pédagogique, le stimulant le plus efficace ; dans l’ordre scientifique, le premier maître et la première matière ; dans l’ordre disciplinaire l’inspecteur le plus vigilant ; dans l'ordre ascétique le modèle le plus vivant ; dans l'ordre économique la grande providence ; et dans l'ordre architectural la pierre angulaire » (Saint Manuel González, Un rêve pastoral).

Repassons ces points afin de mettre Dieu au centre, c’est-à-dire, pour Le laisser être le fondement, le projet et l’architecte, la pierre angulaire. Cela ne s’obtient qu’avec l’adoration. Jésus - nous dit notre saint - nous servira de pédagogue, patient, sévère, doux et ferme selon ce dont nous avons besoin dans notre discernement, car Il nous connaît mieux que nous-mêmes, et Il nous attend, nous encourage et nous soutient tout au long de notre chemin. C’est notre plus grande motivation, car nous avons consacré notre vie à Le suivre.

Il me semble fondamental que dans le domaine scientifique San Manuel associe le fait d’être le maître avec le fait d’être la matière. Dieu veut donner à son Peuple des pasteurs selon son cœur (cf. Jer 13, 15), de Jésus nous n’apprenons pas des choses, nous L’accueillons, nous nous accrochons à Lui, pour pouvoir Le porter aux autres. Et la grande leçon que le Seigneur nous donne est l'humanité, le fait de S'être fait chair, terre, homme, humus pour nous, par amour. Et dans cette matière il n'y a pas d'autre exemple que Lui-même ; de autres vertus et circonstances Jésus présentera des paraboles, des comparaisons, des figues, des graines et des tempêtes, mais la grande leçon de Sa vie nous ne pouvons l’apprendre que de Celui qui est « doux et humble de cœur » (Mt 11, 29).

Pour la discipline, nous confronter chaque matin avec l’Eucharistie - le surveillant le plus vigilant - nous fait réfléchir à la futilité de nos idées mondaines, de nos désirs de monter, d’apparaître, de ressortir. Celui qui est immense se donne totalement à moi et dans mes mains, avant de communier, Il m’interroge : Es-tu réconcilié avec ton frère ? Es-tu vêtu de l’habit de fête ? Es-tu prêt à entrer dans mon banquet éternel ?

Jusqu'à présent, nous avons vu discernement, science et vigilance ; ce sont certainement des aspects clés dans votre séminaire, mais ils ne serviraient à rien sans l'ascèse ; copier un modèle implique un effort, faire une œuvre d'art nécessite de l'inspiration mais aussi du travail, Jésus n'a pas éludé tout cela. Il est nécessaire d'entrer dans le désert, afin qu'Il parle à notre cœur, si celui-ci est plein de mondanité, de choses, aussi religieuses soient-elles appelées, Dieu n’y trouvera pas de place, et nous ne L’entendrons pas quand Il frappera à notre porte. C’est pourquoi le silence, la prière, le jeûne, la pénitence, l’ascèse sont nécessaires pour nous libérer de ce qui nous asservit et être complètement à Dieu. Et cela non seulement intérieurement, mais aussi extérieurement, dans le travail, dans les projets, en nous abandonnant à Jésus ; le Seigneur sera la grande providence, laissons-Le proposer et réaliser, mettons-nous seulement à Ses ordres avec docilité d’esprit.

Chers frères, ayez confiance en celui qui vous a appelés à cette belle tâche, et prosternez-vous en adoration afin de pouvoir construire avec docilité le temple de Dieu en vos personnes et en vos communautés. Et lorsque vous communierez, et un jour lorsque vous célébrerez, n’oubliez pas de prier pour moi. Merci.

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