Audience générale: Se mettre à l'écoute de Madeleine Delbrêl

Poursuivant son cycle de catéchèse sur la passion pour l’évangélisation, ce mercredi 8 novembre 2023 François s’est arrêté sur la figure de l’essayiste et poétesse française Madeleine Delbrêl, reconnue vénérable en janvier 2018. Le Souverain pontife est revenu sur le «cœur toujours en éveil» de la vénérable, qui se laisse interpeller par le cri des pauvres.


Chers frères et sœurs, bonjour !

Parmi les nombreux témoins de la passion pour l'annonce de l'Évangile, ces évangélisateurs passionnés, je présente aujourd'hui la figure d'une femme française du XXe siècle, la vénérable servante de Dieu Madeleine Delbrêl. Née en 1904 et morte en 1964, elle fut assistante sociale, écrivaine et mystique, et vécut pendant plus de trente ans dans la banlieue pauvre et ouvrière de Paris. Éblouie par la rencontre avec le Seigneur, elle écrivit : « Une fois que nous avons connu la parole de Dieu, nous n'avons pas le droit de ne pas la recevoir ; une fois reçue nous n'avons pas le droit de ne pas laisser qu'elle s'incarne en nous, une fois incarnée en nous nous n'avons pas le droit de la garder pour nous : à partir de ce moment nous appartenons à ceux qui l'attendent » (La sainteté des gens ordinaires, Milan 2020, 71). Beau : cela est beau ce qu'elle a écrit...

Après une adolescence vécue dans l'agnosticisme – elle ne croyait à rien –, vers vingt ans Madeleine rencontre le Seigneur, frappée par le témoignage de certains amis croyants. Elle se met alors à la recherche de Dieu, donnant voix à une soif profonde qu'elle ressentait en elle, et arrive à comprendre que ce « vide qui criait en elle son angoisse » était Dieu qui la cherchait (Éblouie par Dieu. Correspondance 1910-1941, Milan 2007, 96). La joie de la foi la conduit à mûrir un choix de vie entièrement donnée à Dieu, au cœur de l'Église et au cœur du monde, simplement en partageant dans la fraternité la vie des « gens des rues ». Elle s'adressait poétiquement à Jésus ainsi : « Pour être avec Toi sur Ta route, il faut aller, même quand notre paresse nous supplie de rester. Tu nous as choisis pour rester dans un étrange équilibre, un équilibre qui ne peut s'établir et se maintenir qu'en mouvement, qu'en un élan. Un peu comme un vélo, qui ne tient pas droit sans tourner [...] Nous pouvons rester droits seulement en avançant, en nous déplaçant, dans un élan de charité » (Humour dans l'Amour. Méditations et poésies, Milan 2011, 56). C'est ce qu'elle appelle la « spiritualité du vélo ». Seulement en chemin, en course, nous vivons en équilibre de la foi, qui est un déséquilibre, mais c’est ainsi : comme le vélo. Si tu t’arrêtes, ça ne tient pas.

Madeleine avait le cœur continuellement tourné vers l’extérieur et se laissait interpeller par le cri des pauvres. Elle sentait que le Dieu Vivant de l'Évangile devait nous brûler de l'intérieur jusqu’à ce que nous ayons porté son nom à ceux qui ne l'ont pas encore trouvé. Dans cet esprit, tournée vers les soubresauts du monde et le cri des pauvres, Madeleine se sent appelée à « vivre l'amour de Jésus entièrement et à la lettre, de l'huile du Bon Samaritain jusqu’au vinaigre du Calvaire, lui rendant ainsi amour pour amour [...] pour que, l'aimant sans réserve et se laissant aimer jusqu’au bout, les deux grands commandements de la charité s'incarnent en nous et ne fassent qu'un » (La vocation de la charité, 1, Œuvres complètes XIII, Bruyères-le-Châtel, 138-139).

Enfin, Madeleine nous enseigne encore autre chose : qu'en évangélisant on est évangélisé : en évangélisant nous sommes évangélisés. C'est pourquoi elle disait, faisant écho à Saint Paul : « Malheur à moi si évangéliser ne m’évangélise pas ». En évangélisant on s’évangélise. Et c’est une belle doctrine.

En regardant ce témoin de l'Évangile, nous aussi apprenons que dans chaque situation et circonstance personnelle ou sociale de notre vie, le Seigneur est présent et nous appelle à habiter notre temps, à partager la vie des autres, à nous mêler aux joies et aux douleurs du monde. En particulier, elle nous enseigne que même les milieux sécularisés nous aident à la conversion, car les contacts avec les non-croyants provoquent le croyant à une révision continuelle de sa façon de croire et à redécouvrir la foi dans son essence (cf. Nous autres, gens des rues, Milan 1988, 268s).

Que Madeleine Delbrêl nous enseigne à vivre cette foi « en mouvement », disons, cette foi féconde dont chaque acte de foi est un acte de charité dans l'annonce de l'Évangile. Merci.


Saluts :

Je salue cordialement les pèlerins venus de France ainsi que tous les membres de l’Union Nationale des Associations familiales catholiques. Face à notre monde sécularisé, ne nous lamentons pas mais voyons-y un appel à éprouver notre foi et une invitation à communiquer la Joie de l’Évangile. Que Dieu vous bénisse.

Je souhaite cordialement la bienvenue aux pèlerins et visiteurs anglophones participant à l'audience d'aujourd'hui, en particulier aux groupes venant d'Angleterre, du Danemark, d'Australie, d'Indonésie, de Malaisie et des États-Unis d'Amérique. Sur vous tous j'invoque la joie et la paix de notre Seigneur Jésus Christ. Que Dieu vous bénisse !

Chers frères et sœurs de langue allemande, la foi est la lumière qui nous conduit vers le Seigneur. Laissez cette lumière briller à travers notre mode de vie afin qu'elle éclaire également les sentiers de ceux qui ne croient pas encore.

Je salue cordialement les pèlerins de langue espagnole. Demandons au Seigneur de nous accorder sa grâce d'être des témoins courageux de l'Évangile, surtout dans les milieux sécularisés, en nous aidant à découvrir l'essentiel de la foi et en nous fortifiant dans les difficultés. Que Jésus vous bénisse et que la Vierge Sainte prenne soin de vous. Merci beaucoup.

Chers pèlerins de langue portugaise, bienvenue ! Ce mois ravive en nous le souvenir nostalgique de nos défunts. Ils nous ont quittés un jour avec la demande, tacite ou explicite, de notre aide spirituelle dans leur passage vers l'au-delà. Nous savons que nos prières pour eux atteignent le ciel. Prions pour eux !

Je salue les croyants de langue arabe. Demandons au Seigneur Jésus de nous donner le courage de travailler avec tous ceux qui œuvrent sur terre pour la libérer du mal et lui redonner sa bonté originelle. Que le Seigneur vous bénisse tous et vous protège toujours de tout mal !

Je salue cordialement les pèlerins polonais. Dans quelques jours, vous célébrerez l'anniversaire de la reconquête de l'indépendance de la Pologne. Que cet anniversaire vous encourage à être reconnaissants envers Dieu. Transmettez votre histoire aux jeunes générations. Je vous bénis de tout cœur.

Pensons et prions pour les peuples qui souffrent de la guerre. N'oublions pas l'Ukraine martyrisée et pensons au peuple palestinien et israélien : que le Seigneur nous mène à une paix juste. On souffre tant : les enfants souffrent, les malades souffrent, les personnes âgées souffrent et tant de jeunes meurent. La guerre est toujours une défaite : n'oublions pas. C'est toujours une défaite.

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