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 Prière pour la paix : le pape déplore le « manque d’amour »

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Prière pour la paix : le pape déplore le « manque d’amour » Empty
MessageSujet: Prière pour la paix : le pape déplore le « manque d’amour »   Prière pour la paix : le pape déplore le « manque d’amour » Icon_minitimeMer 21 Oct 2020 - 19:47



Le « manque d’amour » est « la cause profonde de nos maux personnels, sociaux, internationaux, environnementaux », a affirmé le pape François lors de la prière œcuménique à laquelle il a participé dans la basilique Santa Maria in Aracoeli, sur le Capitole à Rome, ce 20 octobre 2020.

Méditation du pape François :

Prier ensemble est un don. Je vous remercie et je vous salue tous avec affection, en particulier Sa Sainteté le Patriarche Œcuménique, mon frère Bartholomée et le cher Evêque Heinrich, Président du Conseil de l’Eglise Evangélique en Allemagne.

Le passage de la Passion du Seigneur que nous avons écouté se situe juste avant la mort de Jésus et parle de la tentation qui s’abat sur lui, épuisé sur la croix. Pendant qu’il vit le moment le plus extrême de la douleur et de l’amour, de nombreuses personnes, sans pitié, lui lancent un refrain : « Sauve-toi toi-même » (Mc 15, 30). C’est une tentation cruciale, qui nous guette tous, même nous les chrétiens : c’est la tentation de penser seulement à se protéger soi-même ou son propre groupe, d’avoir en tête seulement ses propres problèmes et ses propres intérêts, tandis que tout le reste ne compte pas. C’est un instinct très humain, mais mauvais, et il est l’ultime défi au Dieu crucifié.

Sauve-toi toi-même. Les premiers qui le disent sont « les passants » (v. 29). C’était des gens du commun, qui avaient entendu Jésus parler et opérer des prodiges. Maintenant ils lui disent : « Sauve-toi toi-même, descends de la croix ». Ils n’avaient pas de compassion, mais le désir de miracles, de le voir descendre de la croix. Peut-être nous aussi parfois nous préférerions un dieu spectaculaire plutôt que compatissant, un dieu puissant aux yeux du monde, qui s’impose par la force et écrase ceux qui nous veulent du mal. Mais ceci n’est pas Dieu, c’est notre moi. Que de fois voulons-nous un dieu à notre mesure, plutôt que de devenir nous à la mesure de Dieu ; un dieu comme nous, plutôt que de devenir nous comme lui ! Mais ainsi à l’adoration de Dieu, nous préférons le culte du moi. C’est un culte qui croît et s’alimente de l’indifférence envers l’autre. En effet, pour ces passants, Jésus n’intéressait que pour satisfaire leurs désirs. Mais, réduit à un rebut sur la croix, il n’intéressait plus. Il était devant leurs yeux, mais loin de leurs cœurs. L’indifférence les tenait éloignés du vrai visage de Dieu.

Sauve-toi toi-même. En second lieu les chefs des prêtres et les scribes se mettent en avant. C’étaient ceux qui avaient condamné Jésus parce qu’il représentait pour eux un danger. Mais nous sommes tous des spécialistes pour mettre les autres en croix afin de nous sauver nous-même. Par contre, Jésus se laisse crucifier pour nous enseigner à ne pas décharger le mal sur les autres. Ces chefs religieux l’accusent justement en prenant les autres pour prétexte : « Il en a sauvé d’autres, et il ne peut pas se sauver lui-même » (v. 31). Ils connaissaient Jésus, ils se rappelaient les guérisons et les libérations qu’il avait accomplies et ils en font un lien malicieux : ils insinuent que sauver, secourir les autres, ne sert à rien ; lui qui s’était tant prodigué pour les autres, il est en train de se perdre lui-même ! L’accusation est narquoise et se revêt d’expressions religieuses, en utilisant par deux fois le verbe sauver. Mais « l’évangile » du sauve-toi toi-même n’est pas l’Evangile du salut. C’est l’évangile apocryphe le plus faux, qui met les croix sur les autres. Le vrai Evangile, par contre, se charge des croix des autres.

Sauve-toi toi-même. Enfin, même ceux qui sont crucifiés avec Jésus s’unissent au climat de défi contre lui. Comme il est facile de critiquer, de parler contre, de voir le mal dans les autres et non pas en soi-même, jusqu’à décharger les fautes sur les plus faibles et les marginalisés ! Mais pourquoi ces crucifiés s’en prennent-ils à Jésus ? Parce qu’il ne les descend pas de la croix. Ils lui disent « Sauve-toi toi-même, et nous aussi ! » (Lc 23, 29). Ils cherchent Jésus seulement pour résoudre leurs problèmes. Mais Dieu ne vient pas tant pour nous libérer des problèmes, qui se présentent toujours de nouveau, mais pour nous sauver du vrai problème, qui est le manque d’amour. C’est cela la cause profonde de nos maux personnels, sociaux, internationaux, environnementaux. Penser seulement à soi est le père de tous les maux. Mais un des malfaiteurs observe Jésus et voit en lui la douceur de l’amour. Et il obtient le paradis en faisant une seule chose : en déplaçant son attention de lui vers Jésus, de lui vers celui qui était à côté de lui (cf. v. 42).

Chers frères et sœurs, sur le Calvaire a eu lieu le grand duel entre Dieu venu pour nous sauver et l’homme qui veut se sauver lui-même ; entre la foi en Dieu et le culte du moi ; entre l’homme qui accuse et Dieu qui excuse. Et la victoire de Dieu est arrivée, sa miséricorde est descendue sur le monde. De la croix a jailli le pardon, la fraternité est née de nouveau : « La Croix fait de nous des frères » (Benoît XVI, Paroles à la fin de la Via Crucis, 21 mars 2008). Les bras de Jésus, ouverts sur la croix, marquent le tournant, parce que Dieu ne pointe le doigt contre personne, mais il embrasse chacun. Parce que seul l’amour éteint la haine, seul l’amour vainc jusqu’au bout l’injustice. Seul l’amour fait place à l’autre. Seul l’amour est la voie de la pleine communion entre nous

Demandons au Dieu crucifié, la grâce d’être plus unis, plus fraternels. Et quand nous sommes tentés de suivre les logiques du monde, rappelons-nous les paroles de Jésus : « Celui qui veut sauver sa vie la perdra ; mais celui qui perdra sa vie à cause de moi et de l’Évangile la sauvera » (Mc 8, 35). Ce qui aux yeux du monde est une perte, est salut pour nous. Apprenons du Seigneur, qui nous a sauvés en se vidant de lui-même (cf. Ph 2, 7), en se faisant tout autre : de Dieu se faisant homme, d’esprit se faisant chair, de roi se faisant serviteur. Il nous invite nous aussi à nous « faire autres », à aller vers les autres. Plus nous serons attachés au Christ, plus nous serons ouverts et « universels », parce que nous nous sentirons responsables des autres. Et l’autre sera la voie pour se sauver soi-même : chacun, chaque être humain, quel que soit son histoire et son credo. A commencer par les pauvres, les plus semblables à Jésus. Le grand Archevêque de Constantinople saint Jean Chrysostome écrivait que « s’il n’y avait pas les pauvres, notre salut serait en grande partie démoli » (Sur la IIe Lettre aux Corinthiens, XVII, 2). Que le Seigneur nous aide à marcher ensemble sur la voie de la fraternité, pour être des témoins crédibles du vrai Dieu.
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Source : https://fr.zenit.org/


Discours du pape François :

Chers frères et sœurs !

C’est un motif de joie et de gratitude à Dieu de pouvoir rencontrer ici au Capitole, au cœur de Rome, d’illustres leaders religieux, d’éminentes autorités et de nombreux amis de la paix. Nous avons prié, les uns proches des autres, pour la paix. Je salue Monsieur le Président de la République italienne, l’Honorable Sergio Mattarella. Je suis heureux de me retrouver avec Sa Sainteté le Patriarche Œcuménique Bartholomée. J’apprécie tellement que, malgré les difficultés de voyage, lui et d’autres personnalités ont voulu participer à cette rencontre de prière. Dans l’esprit de la Rencontre d’Assise, convoquée par saint Jean-Paul II en 1986, la Communauté de Sant’Egidio célèbre annuellement, de ville en ville, cet évènement de prière et de dialogue pour la paix entre croyants de diverses religions.

Dans cette vision de paix, il y avait une semence prophétique qui, petit à petit, grâce à Dieu a mûri, avec des rencontres inédites, des actions de pacification, de nouvelles pensées de fraternité. En effet, en regardant en arrière, alors que malheureusement nous rencontrons ces dernières années des évènements douloureux comme des conflits, le terrorisme ou le radicalisme, parfois au nom de la religion, nous devons au contraire reconnaître les progrès fructueux dans le dialogue entre les religions. C’est un signe d’espérance qui nous incite à travailler ensemble comme des frères. Ainsi nous sommes arrivés à l’important Document sur la Fraternité humaine pour la paix mondiale et la coexistence commune, que j’ai signé avec le Grand Imam d’Al-Azhar, Ahmed-al-Tayyeb, en 2019.

En effet, « le commandement de la paix est profondément inscrit dans les traditions religieuses » (Enc. Fratelli tutti, n. 284). Les croyants ont compris que la diversité de religion ne justifie pas l’indifférence ou l’inimitié. Mieux, à partir de la foi religieuse nous pouvons devenir des artisans de paix et non des spectateurs inertes du mal de la guerre et de la haine. Les religions sont au service de la paix et de la fraternité. C’est pourquoi même la présente rencontre pousse les leaders religieux et tous les croyants à prier avec insistance pour la paix, à ne jamais se résigner à la guerre, à agir avec la douce force de la foi pour mettre fin aux conflits.

Il y a un besoin de paix ! Plus de paix ! « Nous ne pouvons pas rester indifférents. Aujourd’hui, le monde a une ardente soif de paix. Dans de nombreux pays on souffre de guerres souvent oubliées, mais qui sont toujours causes de souffrance et de pauvreté » (Discours lors de la Journée Mondiale de Prière pour la Paix, Assise, 20 septembre 2016). Le monde, la politique, l’opinion publique risquent de s’habituer au mal de la guerre, comme une compagne naturelle de l’histoire des peuples. « N’en restons pas aux discussions théoriques, touchons les blessures, palpons la chair des personnes affectées. […] Prêtons attention aux réfugiés, à ceux qui souffrent des radiations atomiques ou des attaques chimiques, aux femmes qui ont perdu leurs enfants, à ces enfants mutilés ou privés de leur jeunesse » (FT, n. 261). Aujourd’hui, les douleurs de la guerre sont aussi aggravées par la pandémie du coronavirus et par l’impossibilité, dans de nombreux pays, d’accéder aux soins nécessaires.

Pendant ce temps, les conflits continuent, et avec eux la souffrance et la mort. Mettre fin à la guerre est un devoir urgent de tous les responsables politiques devant Dieu. La paix est la priorité de toute politique. Dieu demandera compte à celui qui n’a pas cherché la paix ou a attisé les tensions et les conflits de tous les jours, les mois, les années de guerre qui ont frappé les peuples !

La parole du Seigneur Jésus s’impose par sa profonde sagesse : « Rentre ton épée – dit-il –, car tous ceux qui prennent l’épée périront par l’épée » (Mt 26, 52). Ceux qui prennent l’épée, peut-être en croyant résoudre rapidement des situations difficiles, expérimentent sur eux-mêmes, sur leurs proches, sur leurs pays, la mort qui vient de l’épée. « Cela suffit! » (Lc 22, 38), dit Jésus quand les disciples lui montrent deux épées, avant la Passion. “Ça suffit !” : c’est une réponse sans équivoque contre toute violence. Ce “ça suffit !” de Jésus dépasse les siècles et parvient avec force jusqu’à nous aujourd’hui : ça suffit avec les épées, les armes, la violence, la guerre !

Saint Paul VI, aux Nations-Unies en 1965, a fait écho à cet appel en disant : « Plus jamais la guerre ! ». C’est l’imploration de nous tous, des hommes et des femmes de bonne volonté. C’est le rêve de tous les chercheurs et artisans de la paix, bien conscients que « toute guerre laisse le monde pire que dans l’état où elle l’a trouvé » (FT, n. 261).

Comment sortir de conflits bloqués et gangrenés ? Comment dénouer les nœuds enchevêtrés de nombreuses luttes armées ? Comment prévenir les conflits ? Comment pacifier les seigneurs de la guerre ou ceux qui comptent sur la force des armes ? Aucun peuple, aucun groupe social ne pourra atteindre tout seul la paix, le bien, la sécurité et le bonheur. Personne. La leçon de la récente pandémie, si nous voulons être honnêtes, est « la conscience que nous constituons une communauté mondiale qui navigue dans le même bateau, où le mal de l’un porte préjudice à tout le monde. Nous nous sommes rappelés que personne ne se sauve tout seul, qu’il n’est possible de se sauver qu’ensemble » (FT, n. 32).

La fraternité, qui jaillit de la conscience d’être une unique humanité, doit pénétrer dans la vie des peuples, dans les communautés, parmi les gouvernants, dans les enceintes internationales. Ainsi lèvera la conscience qu’on ne se sauve seulement qu’ensemble, en se rencontrant, en négociant, en arrêtant de se combattre, en se réconciliant, en modérant le langage de la politique et de la propagande, en développant des parcours concrets pour la paix (cf. FT, n. 231).

Nous sommes ensemble ce soir comme des personnes de différentes traditions religieuses, pour communiquer un message de paix. Cela manifeste clairement que les religions ne veulent pas la guerre, que bien au contraire elles démentent ceux qui sacralisent la violence, demandent à tous de prier pour la réconciliation et d’agir afin que la fraternité ouvre de nouveaux chemins d’espérance.

En effet, avec l’aide de Dieu, il est possible de construire un monde de paix, et ainsi de se sauver ensemble.
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Source : https://fr.zenit.org/
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