Lors de la messe en la chapelle de la Maison Sainte-Marthe, le Pape a demandé à Dieu de donner à chacun une conscience juste afin d’accomplir le bien et jamais le mal en ces temps difficiles.
L’antienne d’ouverture de ce samedi 4 avril est tirée du Psaume 21 qui commence par les paroles prononcées par Jésus sur la Croix : «Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m'as-tu abandonné ?».
Au début de la messe, le Pape a lu l’appel à l’aide d’un innocent persécuté:
«Seigneur, ne sois pas loin de moi, dépêche-toi ma force pour m’aider, parce que je suis un ver et non un homme, une honte pour tous, la raillerie des gens».
Le Saint-Père a ensuite prononcé l’intention suivante afin que personne ne profite de la pandémie pour réaliser ses propres intérêts :
«Dans ces moments de bouleversement, de difficulté, de douleur, on donne souvent aux gens la chance de faire une chose ou une autre... beaucoup de bonnes choses. Mais quelqu'un a aussi l'idée de faire quelque chose de moins bien, de profiter du moment présent et d'en tirer profit pour lui-même, pour son propre bénéfice. Prions aujourd'hui pour que le Seigneur nous donne à tous une conscience juste, une conscience transparente, pour que nous puissions être vus par Dieu sans avoir honte.»
Dans son homélie, François a commenté l’Évangile de Jean (Jn 11, 45-56) qui raconte la décision du sanhédrin de tuer Jésus après la résurrection de Lazare. Une décision qui arrive au terme d’un processus graduel: c’est le chemin de la tentation qui commence par peu de chose et se transforme ensuite en péché qui se justifie par lui-même. La tentation croît lentement, contamine les autres et se justifie, changeant le cœur. Derrière cette tentation, il y a la ruse du diable qui veut détruire Jésus. Le Pape a prié ce samedi afin que l'Esprit Saint nous éclaire.
Le Saint-Père a conclu la célébration avec un temps d’adoration et une bénédiction eucharistique, en invitant à la communion spirituelle.
Il a ensuite récité cette prière:
«Mon Jésus, je crois que tu es réellement présent dans le Très Saint Sacrement de l’autel. Je t’aime au-delà de toutes choses et je te désire en mon âme. Puisque je ne peux maintenant te recevoir sacramentellement, viens au moins spirituellement dans mon cœur. Je t’embrasse et m’unis totalement à toi. Ne permet pas qu’il ne me sépare jamais de Toi. Amen.»
Texte de l'homélie :
Cela faisait un moment que les docteurs de la Loi et les grands prêtres étaient inquiets parce qu’il se passaient des choses étranges dans le pays. D’abord ce Jean qu’ils laissèrent finalement tomber parce que c’était un prophète. Il baptisait là et les gens y allaient mais il n’y avait pas d’autres conséquences. Ensuite, est venu ce Jésus signalé par Jean. Il commença à faire des signes, des miracles, mais surtout à parler aux gens et les gens comprenaient et le suivaient, et il n’observait pas toujours la loi, et cela provoquait beaucoup d’inquiétude. «C’est un révolutionnaire, un révolutionnaire pacifique… Celui-là fait venir des gens à lui et des gens le suivent».
Cette idée les amenèrent à parler entre eux : «Mais regarde, celui-là ne me plaît pas, et cet autre… » et ainsi il existait entre eux ce thème de conversation, de préoccupation pure. Puis certains sont allés le voir pour le mettre à l’épreuve et, toujours, le Seigneur avait une réponse claire qui ne leur était pas venue à l’esprit, à eux docteurs de la Loi. Pensons à cette femme mariée à sept reprises et sept fois veuve : «Mais au ciel, de quel mari sera-t-elle l’épouse ?». Et Lui répond clairement et eux s’en vont un peu honteux devant la sagesse de Jésus, et d’autres fois, ils s’en sont allés humiliés, comme lorsqu’ils voulurent lapider la femme adultère et que Jésus dit à la fin : «Que celui d’entre vous qui n’a jamais péché lui jette la première pierre» ; l’Évangile dit qu’ils s’en sont allés, à commencer par les plus anciens, humiliés. Cela fait croître cette conversation entre eux : «Nous devons faire quelque chose, cela ne va pas…»
Puis, ils ont envoyé les soldats pour le prendre et ces derniers sont revenus en disant: «Nous n’avons pas pu, parce que cet homme parle comme nul autre». «Vous aussi, vous vous êtes faits avoir»: fâchés parce que même les soldats ne pouvaient le prendre. Après la résurrection de Lazare -ce dont nous avons entendu parlé ce matin-tant de juifs allaient là pour voir les sœurs de Lazare, certains sont allés voir comment étaient vraiment les choses pour les raconter, et certains de ceux-là sont allés auprès des Pharisiens et ont raconté ce que Jésus avait fait, et d’autres crurent en Lui. Ceux-là qui étaient allés (tout) raconter, les commères de toujours, qui vivaient en racontant leurs commérages. À ce moment-là, ce groupe de docteurs de la loi qui s’était formé a tenu une réunion formelle : «Cela est vraiment dangereux, nous devons prendre une décision. Que faire ? Cet homme accomplit beaucoup de signes - ils reconnaissent les miracles -. Si nous le laissons continuer ainsi, tous croiront en lui, c’est dangereux, le peuple le suivra et se détachera de nous. - Le peuple n’était pas attaché à eux -. Les Romains viendront et détruiront notre temple et notre nation.»
En cela, il y avait une part de vérité mais pas toute la vérité. C’était une justification parce qu’ils avaient trouvé un équilibre avec l’occupant. Ils haïssaient l’occupant romain, mais ils avaient trouvé un équilibre. Ainsi, ils parlaient entre eux. Un d’entre eux, Caïphe -le plus radical- dit : «Vous ne vous rendez pas compte que ce qui convient est qu’un seul homme meurt pour le peuple et que la nation tout entière n’aille pas en ruine !». Il était grand prêtre et fait une proposition : «débarrassons-nous en». Et Jean dit que celui-ci ne le disait pas pour lui mais en tant que grand prêtre de l’année, il prophétisa que Jésus devait mourir pour la nation… et qu’ils décidèrent ce jour-là de le tuer.
Ce fut un processus qui commença par de petites inquiétudes du temps de Jean-Baptiste et qui finit par cette réunion des docteurs de la Loi et des prêtres. Un processus qui grandissait et qui était plus (chaque fois) plus sûr de la décision qu’ils devaient prendre, mais personne ne l’avait clairement exprimé. «Celui-là doit mourir». Cette façon de procéder des docteurs de la Loi est vraiment une illustration de comment agit la tentation en nous, parce que derrière cela, il y avait évidemment le diable qui voulait détruire Jésus et la tentation en nous agit généralement ainsi : elle commence par de petites choses, un désir, une idée, elle croît, contamine les autres et à la fin se justifie. Ce sont les trois passages de la tentation du diable en nous, et ce furent les trois tentations du diable dans la personne des docteurs de la loi. Cela a commencé avec peu de choses et cela a crû, a contaminé les autres, a pris corps et à la fin, s’est justifié.
«Il est nécessaire qu’un homme meurt pour le peuple», la justification totale. Et tous s’en sont allés à la maison, tranquilles. Ils avaient dit: «Cela est la décision que nous devions prendre». Et nous tous, quand nous sommes vaincus par la tentation, on finit tranquilles parce que nous avons trouvé une justification pour notre péché, pour ce cheminement empreint de péché, pour cette route prise qui n’était pas selon la Loi de Dieu. Nous devrions avoir l’habitude de voir ce processus de la tentation en nous. Ce processus qui fait passer le cœur du bien au mal, qui conduit sur une route en descente. Une chose croît lentement, contamine les autres et à la fin se justifie.
Les tentations nous viennent rarement d’un seul coup. Le diable est malin. Il sait prendre cette route, il l’a prise pour arriver à la condamnation de Jésus. Quand nous nous trouvons devant un péché, une chute, oui, nous devons aller demander pardon au Seigneur, c’est le premier pas que nous devons faire, et ensuite nous devons dire : « Comment ai-je fait pour tomber aussi bas ? Comment ce processus a-t-il commencé en mon âme ? Comment a-t-il grandi ? Qui ai-je contaminé ? Et comment ai-je finalement justifié ma chute ? »
La vie de Jésus est toujours un exemple pour nous et les choses qui sont advenues à Jésus sont des choses qui nous arriverons à nous, les tentations, les justifications, les bonnes personnes autour de nous et peut-être que nous n’entendons pas les méchants et qu’au moment de la tentation nous cherchons à nous approcher d’eux pour faire croître la tentation. Mais nous n’oublions jamais que toujours derrière un péché il y a une chute, qu’il y a une tentation qui commence tout petite, qui croît, qui contamine et à la fin trouve une justification pour chuter. Que l’Esprit Saint nous éclaire en cette connaissance intérieure.