Le pape François a inauguré le « triduum » de la JMJ de Panama, ce jeudi 25 janvier 2019, à Panama, à la « Cinta Costera » sur le Pacifique, en présence de quelque 200 000 jeunes du monde entier, selon les chiffres de Vatican News.
Discours préparé par le pape François :
Chers jeunes, Bonsoir!
Qu’il est bon de vous retrouver et de le faire sur cette terre qui nous reçoit avec tant de couleur et tant de chaleur! Les Journées Mondiales de la Jeunesse réunies à Panama sont, une nouvelle fois, une fête de joie et d’espérance pour toute l’Eglise et un énorme témoignage de foi pour le monde.
Je me souviens qu’à Cracovie certains m’avaient demandé si j’irais à Panama et je leur avais répondu: “je ne sais pas, mais Pierre ira sûrement. Pierre ira sûrement”. Aujourd’hui, je suis heureux de vous dire: Pierre est avec vous pour célébrer et renouveler la foi et l’espérance. Pierre et l’Eglise marchent avec vous et nous voulons vous dire de ne pas avoir peur, d’aller de l’avant avec cette énergie rénovatrice et ce souci constant qui nous aide et nous fait bouger pour être plus joyeux et plus disponibles, plus “témoins de l’Evangile”. Aller de l’avant non pas pour créer une église parallèle un peu plus “divertissante” ou “cool” dans un événement pour les jeunes, avec tel ou tel élément décoratif, comme si cela vous suffisait pour vous rendre heureux. Penser ainsi serait ne pas vous respecter et ne pas respecter ce que l’Esprit nous dit à travers vous.
Au contraire! Nous voulons retrouver et réveiller avec vous la continuelle nouveauté et jeunesse de l’Eglise, en nous ouvrant à une nouvelle Pentecôte (cf. Synode sur les Jeunes, Doc. Final, n. 60). Cela n’est possible, comme nous venons de le vivre dans le Synode, que si nous osons marcher en nous écoutant et écouter en nous complétant, si nous osons témoigner en annonçant le Seigneur par le service de nos frères; service concret, je veux dire.
Je sais que venir jusqu’ici n’a pas été facile. Je sais les efforts, les sacrifices que vous avez faits pour pouvoir participer à ces Journées. Beaucoup de journées de travail et d’engagement, des rencontres de réflexion et de prière ont fait que le chemin est, en grande partie, la récompense. Le disciple n’est pas seulement celui qui arrive en un lieu mais celui qui commence avec décision, celui qui n’a pas peur de risquer et de se mettre en marche. C’est cela sa plus grande joie: être en marche. Vous n’avez pas eu peur de risquer et de marcher. Aujourd’hui nous pouvons “faire la rumba”, car cette rumba a commencé il y a longtemps dans chaque communauté.
Nous venons de cultures et de peuples différents, nous parlons des langues différentes, nous portons des vêtements différents. Chacun de nos peuples a vécu des histoires et des événements différents. Que de choses peuvent nous différencier! Mais rien de tout cela n’a empêché de pouvoir nous rencontrer et de nous sentir heureux d’être ensemble. Cela est possible parce que nous savons qu’il y a quelque chose qui nous unit, il y a quelqu’un qui nous rapproche. Chers amis, vous avez fait beaucoup de sacrifices afin de pouvoir vous rencontrer et vous devenez ainsi de véritables maîtres et artisans de la culture de la rencontre. Par vos gestes et vos attitudes, par vos regards, vos désirs et surtout par votre sensibilité vous refusez et désavouez tous ces discours qui se focalisent et s’efforcent de semer la division, à exclure ou rejeter ceux “qui ne sont pas comme nous”. Et cela parce que vous avez ce flair qui sait pressentir que «L’amour véritable n’efface pas les différences légitimes, mais les harmonise en une unité supérieure » (Benoît XVI, Homélie, 25 janvier 2006). Au contraire, nous savons que le père du mensonge préfère un peuple divisé qui se dispute, qu’un peuple qui apprend à travailler ensemble.
Vous nous enseignez que se rencontrer ne signifie pas s’imiter, ni penser tous la même chose ou vivre tous de la même manière faisant et répétant les mêmes choses, écoutant la même musique ou portant le maillot de la même équipe de football. Non, pas ça. La culture de la rencontre est un appel et une invitation à oser garder vivant un rêve commun. Oui, un grand rêve capable d’abriter tout le monde. Ce rêve pour lequel Jésus a donné sa vie sur la croix et que l’Esprit Saint a répandu et a marqué au feu, le jour de la Pentecôte, dans le cœur de tout homme et de toute femme, le tien et le mien, dans l’attente de trouver de la place pour grandir et se développer. Un rêve appelé Jésus semé par le Père dans la confiance qu’il grandira et vivra en chaque cœur. Un rêve qui circule dans nos veines, qui fait frissonner le cœur et le fait danser chaque fois que nous l’écoutons: «Aimez-vous les uns les autres. Comme je vous ai aimés, vous aussi aimez-vous les uns les autres. A ceci, tous reconnaîtront que vous êtes mes disciples: si vous avez de l’amour les uns pour les autres» (Jn, 13, 34-35).
Un saint de cette terre aimait dire: «Le christianisme n’est pas un ensemble de vérités qu’il faut croire, de lois qu’il faut respecter, ou d’interdictions. Il deviendrait ainsi repoussant. Le christianisme est une Personne qui m’a beaucoup aimé, qui réclame et demande mon amour. Le christianisme c’est le Christ» (cf. Saint Oscar Romero, Homélie, 6 novembre 1977). C’est réaliser le rêve pour lequel il a donné sa vie: aimer du même amour dont il nous a aimés.
Nous nous demandons: Qu’est-ce qui nous maintient unis? Pourquoi sommes-nous unis? Qu’est-ce qui nous pousse à nous rencontrer? L’assurance de savoir que nous avons été aimés d’un amour intime que nous ne pouvons pas ni ne voulons taire et qui nous met au défi de répondre de la même manière: avec amour. C’est l’amour du Christ qui nous presse (cf. 2Co 5, 14).
Un amour qui ne “contraint” pas ni n’écrase, un amour qui ne marginalise pas ni ne réduit au silence, un amour qui n’humilie pas ni n’asservit. C’est l’amour du Seigneur, amour quotidien, discret et respectueux, amour de liberté et pour la liberté, amour qui guérit et qui relève. C’est l’amour du Seigneur qui apprend plus à redresser qu’à faire chuter, à réconcilier qu’à interdire, à donner de nouvelles chances qu’à condamner, à regarder l’avenir plus que le passé. C’est l’amour silencieux de la main tendue dans le service et le don de soi qui ne se vante pas.
Crois-tu en cet amour? Cet amour en vaut-il la peine?
Ce fut la même demande et la même invitation que reçut Marie. L’ange lui a demandé si elle voulait porter ce rêve dans ses entrailles et le faire vie, le faire chair. Elle a dit: «Voici la servante du Seigneur; que tout m’advienne selon ta parole» (Lc 1, 38). Marie a osé dire “oui”. Elle a osé donner vie au rêve de Dieu. Et c’est la même chose que l’ange veut demander à vous, à moi: Veux-tu que ce rêve prenne vie?Veux-tu lui donner chair avec tes mains, avec tes pieds, avec ton regard, avec ton cœur? Veux-tu que l’amour du Père t’ouvre de nouveaux horizons et te conduise sur des chemins jamais pensés ni imaginés, rêvés ni espérés, qui réjouissent et fassent chanter et danser le cœur?
Est-ce que nous osons dire à l’ange, comme Marie:Voici les serviteurs du Seigneur, qu’il en soit ainsi ?
Chers jeunes: la chose la plus attendue avec espérance de ces Journées ne sera pas un document final, une lettre convenue ou un programme à exécuter. La chose la plus attendue de cette rencontre sera vos visages et une prière. Chacun retournera chez lui avec la force nouvelle qui apparait chaque fois que nous nous rencontrons et rencontrons le Seigneur, remplis de l’Esprit Saint pour rappeler et garder vivant ce rêve qui nous unit et que nous sommes invités à ne pas laisser geler dans le cœur du monde: là où nous nous rencontrons, faisant ce que nous sommes en train de faire, nous pouvons toujours lever les yeux et dire: Seigneur, apprends-moi à aimer comme toi tu nous a aimés – répétez-le avec moi – Seigneur apprend-moi à aimer comme toi tu nous a aimés.
Nous ne pouvons pas terminer cette première rencontre sans remercier. Merci à tous ceux qui ont préparé avec beaucoup d’enthousiasme ces Journées Mondiales de la Jeunesse. Merci d’oser organiser et accueillir, de dire “oui” au rêve de Dieu de voir ses enfants réunis. Merci Mgr Ulloa et à toute votre équipe pour aider à ce que le Panama soit aujourd’hui non seulement un canal qui unit les mers, mais aussi un canal où le rêve de Dieu continue de trouver des voies pour grandir, se multiplier et se répandre dans tous les recoins de la terre.
Chers amis, Que Jésus vos bénisse et que Santa Maria la Antigua vous accompagne toujours, afin que nous soyons capables de dire sans crainte, comme elle: «Je suis là. Qu’il en soit ainsi».