Le pape François invite les évêques à faciliter l’accès aux tribunaux ecclésiastiques pour que les fidèles puissent sans obstacle obtenir une « vérification » de la validité de leur mariage et qu’ils accèdent à la « vérité » sur leur situation.
Le pape a rencontré ce vendredi après-midi, 18 novembre 2016, au Vatican, les participants d’un cours sur les procès « matrimoniaux » organisé au tribunal apostolique de la Rote romaine pour les évêques récemment nommés (17-19 novembre).
Allocution du pape François :
Chers frères et sœurs,
Votre présence à ce cours de formation, promu par le Tribunal apostolique de la Rote romaine souligne combien les évêques, bien que constitués en vertu de la force de l’ordination comme des maîtres de la foi (cf. Lumen gentium, 25), ont besoin d’apprendre continuellement.
Il s’agit de comprendre les besoins et les questions de l’homme d’aujourd’hui, et de chercher les réponses dans la Parole de Dieu et dans les vérités de la foi, toujours étudiées et mieux connues. L’exercice de la charge d’enseigner (munus docendi) est intimement lié à ceux de la sanctification et du gouvernement (munus sanctificandi et munus regendi). C’est grâce à ces trois fonctions que le ministère pastoral de l’évêque, fondé sur la volonté du Christ, s’exerce, avec l’assistance de l’Esprit Saint et en finalisant et en actualisant le message de Jésus.
L’inculturation de l’Evangile se fonde justement sur ce principe qui unit la fidélité à l’annonce évangélique et sa compréhension et sa traduction dans le temps. Dans Evangelii nuntiandi, le bienheureux Paul VI exhortait à ne pas évangéliser de façon superficielle, mais en s’insérant dans le concret des situations et des personnes. Voilà ce qu’il dit : « Il importe d’évangéliser — non pas de façon décorative, comme par un vernis superficiel, mais de façon vitale, en profondeur et jusque dans leurs racines — la culture et les cultures de l’homme, dans le sens riche et large que ces termes ont dans Gaudium et spes [50], partant toujours de la personne et revenant toujours aux rapports des personnes entre elles et avec Dieu » (n. 20).
C’est justement l’attention pour les personnes qui est le motif théologique et ecclésiologique sous-jacent à ce cours de formation. La santé spirituelle, la salus animarum des personnes qui nous sont confiées constitue la finalité de toute action pastorale.
Dans la première lettre de Pierre, nous trouvons une référence fondamentale pour la charge épiscopale : « Soyez les pasteurs du troupeau de Dieu qui se trouve chez vous ; veillez sur lui, non par contrainte mais de plein gré, selon Dieu ; non par cupidité mais par dévouement ; non pas en commandant en maîtres à ceux qui vous sont confiés, mais en devenant les modèles du troupeau» (5,2-3). Cette exhortation éclaire toute la mission de l’évêque, en présentant le pouvoir spirituel comme un service pour le salut des hommes.
Dans cette perspective, il faut éliminer avec décision tout empêchement de caractère mondain qui rend l’accès aux tribunaux ecclésiastiques difficile pour un grand nombre de fidèles. Des questions d’ordre économique ou d’organisation ne peuvent pas constituer un obstacle pour la vérification canonique de la validité d’un mariage. Dans l’optique d’un sain rapport entre justice et charité, la loi de l’Eglise ne peut pas faire abstraction du principe fondamental de la salus animarum.
Les tribunaux ecclésiastiques sont donc appelés à être l’expression tangible d’un service diaconal du droit par rapport à cette fin première. Elle est placée, de façon opportune, comme le dernier mot du Code de droit canon, afin qu’elle le surpasse, en tant que loi suprême, et comme une valeur qui dépasse le droit lui-même, indiquant ainsi l’horizon de la miséricorde.
L’Eglise avance toujours dans cette perspective, comme une mère qui accueille et qui aime, à l’exemple de Jésus Bon Samaritain. L’Eglise du Verbe incarné « s’incarne » dans les événements tristes dont souffrent les gens, elle se penche sur les pauvres et sur ceux qui sont loin de la communauté ecclésiale ou qui se considèrent en dehors d’elle, en raison d’un échec conjugal.
Cependant, ils sont et ils demeurent incorporés au Christ en vertu du baptême. C’est pourquoi il nous revient la grave responsabilité d’exercer le « munus » reçu de Jésus divin Pasteur, médecin et juge des âmes, de ne jamais les considérer comme étrangers au Corps du Christ qui est l’Eglise. Nous sommes appelés à ne pas les exclure de notre souci pastoral mais à nous dévouer à eux, et à leur situation irrégulière et soufferte, avec une grande sollicitude et une grande charité.
Chers frères évêques, vous venez de différents pays, et vous avez apporté à cette rencontre les sollicitations et les questions qui émergent du domaine de la pastorale matrimoniale de vos diocèses respectifs. Ces demandes réclament des réponses et des mesures qui ne sont pas toujours faciles. Je suis sûr que ces journées d’étude vous aideront à identifier l’approche la plus opportune selon les différentes problématiques. Je remercie donc le doyen, Mgr Pinto, d’avoir promu ce cours formateur, ainsi que les conférenciers pour leur apport juridique, théologique et pastoral compétent.
Vous rentrerez dans vos diocèses enrichis de notions et de suggestions utiles pour accomplir votre ministère plus efficacement, spécialement en ce qui concerne le nouveau procès matrimonial. Il représente une aide importante pour faire grandir dans le troupeau qui vous a été confié la stature du Christ Bon Pasteur dont nous devons apprendre chaque jour la sage recherche de l’unique nécessaire, « unum necessarium » : salus animarum. C’est le bien suprême qui s’identifie avec Dieu lui-même, comme l’enseigne Grégoire de Nazianze.
Ayez confiance dans l’assistance indéfectible de l’Esprit Saint, qui conduit l’Eglise invisiblement mais réellement. Prions-le pour qu’il vous aide et qu’il aide aussi le Successeur de Pierre à répondre, avec disponibilité et humilité, à l’appel à l’aide de tant de nos frères et sœurs qui ont besoin de faire la vérité sur leur mariage et sur la route de leur vie.