Le pape François a reçu en audience, ce mardi 28 juin, au Vatican, une délégation du patriarcat œcuménique de Constantinople, venue à Rome selon la tradition à l’occasion de la solennité des Saints Apôtres Pierre et Paul.
Discours du pape François :
Chers frères dans le Christ, C’est avec joie et affection que je vous souhaite cordialement la bienvenue, à l’occasion de la fête des Saints patrons de cette Église de Rome, les apôtres Pierre et Paul. Je vous remercie pour votre présence et je vous prie de transmettre mes sentiments de vive gratitude à Sa Sainteté le patriarche œcuménique Bartholomaios et au Saint Synode qui ont voulu envoyer une délégation importante pour partager avec nous tous la joie de cette fête.
Cette année, elle a lieu alors que l’Église catholique vit le Jubilé extraordinaire de la miséricorde, que j’ai voulu déclarer comme un temps favorable pour contempler le mystère de l’amour infini du Père révélé dans le Christ et pour rendre plus fort et efficace notre témoignage de ce mystère (cf. Bulle Misericordiae vultus, 2-3). Les saints Pierre et Paul, dans leurs histoires personnelles, si différentes à de nombreux aspects, ont fait tous les deux l’expérience d’abord du péché, puis de la puissance de la miséricorde divine.
À travers cette expérience, Pierre, qui avait renié son maître, et Paul, qui persécutait l’Église naissante, sont devenus d’infatigables annonciateurs et des témoins intrépides du salut offert par Dieu à tous les hommes en Jésus-Christ. Suivant l’exemple des apôtres Pierre et Paul, et des autres apôtres, l’Église, composée d’hommes pécheurs mais rachetés par le baptême, a continué au cours de l’histoire à proclamer la même annonce de la miséricorde divine.
En célébrant la fête des apôtres, nous renouvelons la mémoire de cette expérience de pardon et de grâce qui est commune à tous les croyants dans le Christ. Il existe, à partir des premiers siècles, beaucoup de différences entre l’Église de Rome et l’Église de Constantinople, dans le domaine liturgique, dans les disciplines ecclésiastiques et aussi dans la manière de formuler l’unique vérité révélée.
Toutefois, à la base de toutes ces formes concrètes que nos Églises ont assumées dans le temps, il y a toujours la même expérience de l’amour infini de Dieu pour notre petitesse et fragilité et la même vocation à être témoins de cet amour envers tous. Reconnaître que l’expérience de la miséricorde de Dieu est le lien qui nous lie implique que nous devons toujours plus faire en sorte que la miséricorde devienne le critère de nos relations réciproques. Si, en tant que catholiques et orthodoxes, nous voulons proclamer ensemble les merveilles de la miséricorde de Dieu au monde entier, nous ne pouvons pas conserver entre nous des sentiments et des attitudes de rivalité, de méfiance, de rancœur.
La miséricorde même nous libère du poids d’un passé marqué par des conflits et nous permet de nous ouvrir à l’avenir vers lequel l’Esprit Saint nous guide. Une contribution au dépassement des obstacles qui empêchent de retrouver cette unité que nous avons vécue dans le premier millénaire, et qui n’a jamais été uniformité, mais toujours communion dans le respect des légitimes différences, est offerte par le dialogue théologique.
Cher Métropolite Methodios, je voudrais vous exprimer ma satisfaction pour le travail fécond réalisé par la Consultation théologique orthodoxe-catholique de l’Amérique du nord dont Votre Éminence est co-président. Instituée il y a plus de cinquante ans, cette Consultation propose des réflexions importantes sur des questions théologiques centrales dans les relations entre nos Églises, favorisant ainsi le développement d’excellents rapports entre catholiques et orthodoxes de ce continent.
À ce sujet, je me réjouis parce qu’en septembre prochain, se réunira de nouveau la Commission mixte internationale pour le dialogue théologique entre l’Église catholique et l’Église orthodoxe. La tâche de cette Commission est très précieuse ; prions le Seigneur afin que son travail se poursuive de manière fructueuse. Je fais une mention particulière de vous dans la prière, cher archevêque Job qui avez été nommé Co-président orthodoxe de cette commission, et j’exprime ma sincère gratitude à l’égard de notre vénéré frère le métropolite Jean de Pergame qui, pendant de nombreuses années, a rempli cette tâche avec dévouement et compétence.
Je rends grâce au Seigneur parce qu’en avril dernier, il m’a donné l’occasion de rencontrer mon bienaimé frère Bartholomaios lorsqu’avec l’archevêque d’Athènes et de toute la Grèce, Sa Béatitude Hiéronyme II, nous nous sommes rendus sur l’ile de Lesbos pour rendre visite aux réfugiés et aux migrants. Regarder le désespoir sur le visage d’hommes, de femmes et d’enfants incertains sur leur sort, écouter impuissants le récit de leurs mésaventures et s’arrêter en prière sur la rive de cette mer qui a englouti la vie de tant d’êtres humains innocents a été une expérience très émouvante, qui a confirmé combien il y a encore à faire pour assurer dignité et justice à tous ces frères et sœurs. Une grande consolation dans ces moments si tristes a été la forte proximité humaine et spirituelle dont j’ai fait l’expérience avec le patriarche Bartholomaios et l’archevêque Hiéronyme.
Guidés par l’Esprit Saint, nous prenons toujours davantage conscience que nous, catholiques et orthodoxes, avons une responsabilité commune à l’égard de ceux qui sont dans le besoin, par obéissance à l’unique Évangile de Jésus Christ notre Seigneur. Assumer ensemble une telle responsabilité est un devoir qui touche la crédibilité même de notre identité de chrétien. J’encourage pour cela toutes les formes de collaboration entre catholiques et orthodoxes dans des activités concrètes au service de l’humanité souffrante. Éminence, chers frères, récemment s’est conclue en Crète la célébration du Concile panorthodoxe.
Avec de très nombreux frères et sœurs catholiques et chrétiens d’autres Eglises, j’ai accompagné de ma prière la préparation immédiate et le déroulement du Concile. Le cardinal Koch et Mgr Farrell, qui ont participé à cet événement historique comme observateurs fraternels de l’Église catholique et qui viennent de rentrer de Crète, pourront me faire le récit de ce qui s’y est passé et des résolutions adoptées. Puisse l’Esprit Saint faire germer de cet événement des fruits abondants pour le bien de l’Église.
À l’issue de notre rencontre, je renouvelle l’expression de ma sincère gratitude pour votre présence en vous assurant de mon amour et de mon respect fraternel pour le patriarcat œcuménique ; confions nos intentions de prière à l’intercession de la Très Sainte Vierge Marie, des saints Pierre et Paul et de saint André, frère de Pierre. Et je vous demande, s’il vous plaît, de prier pour moi et pour mon ministère.