Le pape a reçu en audience dans la Salle Clémentine du Palais apostolique, les participants de la 28e et dernière assemblée plénière du Conseil pontifical pour les laïcs ce vendredi 17 juin. Le Conseil sera englobé par un nouveau dicastère qui regroupe des compétences pour les laïcs, la famille et la protection de la vie et entrera en fonction le 1er septembre.
Discours du pape François :
Chers frères et sœurs,
Je ne voudrais pas que ces paroles soient la « valedictio » adressée au dicastère, le congédiement, mais qu’elles soient précisément des paroles de remerciements pour tout le travail effectué.
Je vous accueille à l’occasion de votre Assemblée plénière ; je vous salue tous cordialement et je remercie le cardinal président pour ses aimables paroles. Cette rencontre revêt un caractère particulier, puisque, comme je l’ai déjà annoncé, votre Conseil pontifical assumera une nouvelle physionomie. Il s’agit de la conclusion d’une étape importante et de l’ouverture d’une nouvelle étape pour le dicastère de la Curie romaine qui a accompagné la vie, la maturation et les transformations du laïcat catholique depuis le Concile Vatican II jusqu’à aujourd’hui.
C’est pourquoi l’occasion est propice pour poser un regard sur les presque cinquante ans d’activité du dicastère et en même temps projeter une présence renouvelée au service du laïcat, continuellement en effervescence et traversé de nouvelles problématiques. Le Conseil pontifical pour les laïcs est né de la volonté express du Concile Vatican II qui, dans le décret sur l’apostolat des laïcs, a voulu que se constitue « auprès du Saint-Siège un secrétariat spécial pour le service et la promotion de l’apostolat des laïcs », afin d’assister « assisterait de ses conseils la hiérarchie et les laïcs sur le plan des activités apostoliques » (Apostolicam actuositatem, 26). Et ainsi, le bienheureux Paul VI a donné vie à ce dicastère qu’il n’a pas hésité à définir comme « un des meilleurs fruits du Concile Vatican II » (Motu proprio Apostolatus peragendi [10 décembre 1976], 697) – et il était le « pape » de la FUCI (Fédération universitaire catholique italienne, ndlt), des jeunes, des laïcs ; il avait travaillé beaucoup et sentait beaucoup cela – en le concevant – ce fruit – non pas comme un organe de contrôle mais comme centre de coordination, d’étude, de consultation, destiné à « inciter les laïcs à prendre part part à la vie et à la mission de l’Église […] en tant que membres d’association […] ou comme fidèles individuels » (ibid.) Le Conseil pontifical est pour inciter !
Remercions donc le Seigneur pour les fruits abondants et pour les nombreux défis de ces années. Nous pouvons évoquer, par exemple, la nouvelle saison associative qui, à côté des autres associations laïques avec une longue et digne histoire, a vu apparaître tant de mouvements et nouvelles communautés ayant un grand élan missionnaire ; des mouvements que vous avez suivis dans leur développement, accompagnés avec attention et assistés dans la phase délicate de la reconnaissance juridique de leurs statuts. Et puis l’apparition des nouveaux ministères laïcs, auxquels ont été confiées un bon nombre d’activités apostoliques. En outre, il faut souligner le rôle croissant de la femme dans l’Église, avec sa présence, sa sensibilité et ses dons. Et enfin, la création des Journées mondiales de la jeunesse, geste providentiel de saint Jean-Paul II, instrument d’évangélisation des nouvelles générations dont vous prenez soin avec un engagement particulier.
Par conséquent, nous pouvons dire que le mandat que vous avez reçu du Concile a été précisément de « pousser » les fidèles laïcs à s’impliquer toujours davantage et mieux dans la mission évangélisatrice de l’Église, non par « délégation » de la hiérarchie mais dans la mesure où leur apostolat « est participation à la mission salvifique de l’Église, à laquelle tous sont désignés par le Seigneur par le moyen du baptême et de la confirmation » (Const. Dogm. Lumen gentium, 33). Et c’est là la porte d’entrée. On entre dans l’Église par le baptême, non par l’ordination sacerdotale ou épiscopale, on entre par le baptême ! Et nous sommes tous entrés par la même porte. C’est le baptême qui fait de tous les fidèles laïcs des disciples missionnaires du Seigneur, sel de la terre, lumière du monde, levain qui transforme la réalité de l’intérieur.
Les activités de l’Église, comme celles que nous avons évoquées, s’adressent toujours aux visages, aux esprits et aux cœurs de personnes concrètes. Et il est important que, dans votre assemblée plénière, vous ayez voulu rappeler tous ceux qui se sont dépensés avec passion et engagement dans l’animation, dans la promotion et dans la coordination de la vie et de l’apostolat des laïcs les années passées. Avant tout, les différents présidents qui se sont succédé ; puis les nombreux membres et consulteurs parmi lesquels il y eut Karol Wojtyla lui-même qui a suivi avec intérêt et clairvoyance ce dicastère dès ses premiers pas ; et ensuite tous les laïcs qui y ont travaillé avec générosité et compétence et beaucoup d’autres qui ont travaillé dans le silence en faveur du laïcat catholique.
À la lumière de ce chemin parcouru, il est temps de regarder l’avenir de manière nouvelle avec espérance. Beaucoup reste encore à faire pour élargir les horizons et recueillir les nouveaux défis que nous présente la réalité. C’est de là que nait le projet de réforme de la Curie, en particulier de l’incorporation de votre dicastère au Conseil pontifical pour la famille, en lien avec l’Académie pour la vie. Je vous invite par conséquent à accueillir cette réforme qui vous verra impliqués, comme un signe de valorisation et d’estime pour le travail que vous effectuez et comme un signe de confiance renouvelée dans la vocation et la mission des laïcs dans l’Église d’aujourd’hui. Le nouveau dicastère qui verra le jour aura comme « gouvernail », pour poursuivre sa navigation, d’un côté Christifideles laici et de l’autre Evangelii gaudium et Amoris laetitia, avec comme champ de travail privilégié la famille et la défense de la vie.
En ce moment historique particulier, et dans le contexte du Jubilé de la miséricorde, l’Église est appelée à prendre toujours davantage conscience qu’elle est « la maison paternelle où il y a de la place pour chacun avec sa vie pénible » et pécheresse (Ex. ap. Evangelii gaudium, 47) ; d’être une Église qui sort en permanence, « communauté évangélisatrice […] qui sait prendre sans peur l’initiative, aller à la rencontre, chercher ceux qui sont loin et arriver aux carrefours des routes pour inviter les exclus » (ibid., 24). Je voudrais vous proposer, comme horizon de référence pour votre avenir immédiat, un binôme que l’on pourrait formuler ainsi : « Église en sortie – laïcat en sortie ». Vous aussi, donc, élevez votre regard et regardez « dehors », regardez tous ceux qui sont « loin » dans notre monde, toutes les familles en difficulté et qui ont besoin de miséricorde, tous les champs d’apostolat encore inexplorés, tous les laïcs au cœur bon et généreux qui mettraient volontiers leurs énergies, leur temps et leurs capacités au service de l’Évangile s’ils étaient impliqués, valorisés et accompagnés avec affection et dévouement par les pasteurs et les institutions ecclésiastiques. Nous avons besoin de laïcs bien formés, animés par une foi paisible et limpide, dont la vie a été touchée par la rencontre personnelle et miséricordieuse avec l’amour de Jésus-Christ. Nous avons besoin de laïcs qui risquent, qui se salissent les mains, qui n’aient pas peur de se tromper, qui aillent de l’avant. Nous avons besoin de laïcs avec une vision de l’avenir, qui ne soient pas enfermés dans les broutilles de la vie. Et je l’ai dit aux jeunes : nous avons besoin de laïcs qui aient le goût de l’expérience de la vie, qui osent rêver. Aujourd’hui, c’est le moment où les jeunes ont besoin des rêves des anciens. Dans cette culture du rejet, ne nous habituons pas à écarter les personnes âgées ! Poussons-les, poussons-les afin qu’elles rêvent et – comme le dit le prophète Joël – qu’elles « aient des songes », cette capacité de rêver, et qu’elles nous donnent à tous la force de nouvelles visions apostoliques.
Je vous remercie tous, chers frères membres et consulteurs, pour le travail effectué au service de ce dicastère et je vous encourage à vous ouvrir avec docilité et humilité aux nouveautés de Dieu qui nous surprennent et nous dépassent mais ne nous déçoivent jamais, comme le fit Marie, notre mère et maîtresse dans la foi. De tout cœur, je vous donne à tous ainsi qu’à ceux qui vous sont chers, ma bénédiction. Et, s’il vous plaît, n’oubliez pas de prier pour moi.