Ni "cléricaux" ni "fonctionnaires", mais des pasteurs qui « s’abaissent sans rien garder pour soi » et qui découvrent que « la vraie joie se savoure dans la fraternité, une fraternité vécue »: voilà le portrait robot des prêtres du IIIe millénaire brossé par le pape François.
Le pape François a en effet adressé, le 8 novembre, un message aux évêques de la Conférence épiscopale italienne à l'iccasion de leur 67e assemblée, sur le thème d ela vie et du minsitère des prêtres.
C’est la troisième fois en huit jours que le pape insiste sur la fraternité sacerdotale, et c’est la seconde fois qu’il aborde la question de la « maternité » spirituelle de l’Eglise comme passant par le ministère des évêques et des prêtres.
A propos de la formation au ministère, le pape a ajouté : « Formation initiale et formation permanente sont deux moments d’une seule réalité: la marche du disciple prêtre, épris de son Seigneur et constamment sur ses pas. »
Message du pape François :
Chers frères dans l’épiscopat,
Je souhaite par ces quelques lignes exprimer ma proximité à chacun de vous ainsi qu’aux Eglises qui vous entourent et dont vous êtes les Pasteurs grâce à l’Esprit de Dieu. Puisse ce même Esprit animer de sa sagesse et de son intelligence l’Assemblée générale qui va commencer, tout spécialement consacrée à la vie et à la formation permanente des prêtres.
A ce propos, votre venue à Assise fait aussitôt penser au grand amour et à la vénération que saint François nourrissait pour notre Sainte Mère l’Eglise hiérarchique, et tout spécialement pour les prêtres, y compris ceux qui étaient pour lui des « pauperculos huius saeculi » (Testament).
Parmi les grandes responsabilités que vous confie le ministère épiscopal figure celui de confirmer, soutenir et fortifier vos premiers collaborateurs, par lesquels passe la maternité de l’Eglise pour atteindre tout le peuple de Dieu. Combien en avons-nous connus ! Combien par leur témoignage ont contribué à nous attirer vers une vie de consécration! Combien d’entre eux nous ont appris et nous ont façonnés !
Que chacun de nous, dans la mémoire reconnaissante du cœur, conserve leurs noms et visages.
Nous les avons vus dépenser leur vie parmi les gens de nos paroisses, éduquer les enfants, accompagner les familles, rendre visite aux malades à domicile et dans les hôpitaux, prendre en charge les pauvres, conscients que « se séparer des autres pour ne pas se salir est la plus grande des saletés » (L. Tolstoï). Libérés de toute chose et d’eux-mêmes, ils rappellent à tous que s’abaisser sans rien garder pour soi est le chemin qui conduit à cette hauteur que l’Evangile appelle « charité »; et que la vraie joie se savoure dans la fraternité, une fraternité vécue.
Les saints prêtres sont des pécheurs pardonnés et des instruments du pardon. Leur existence parle la langue de la patience et de la persévérance ; ils ne sont pas restés des touristes de l’esprit, des éternels indécis et insatisfaits, car ils se savent dans les mains de Quelqu’un qui ne manque pas à ses promesses et dont la Providence fait en sorte que rien ne puisse jamais les séparer de cette appartenance. Cette conscience grandit en même temps que la charité par laquelle ils entourent d’attention et de tendresse les personnes qui leur sont confiées, jusqu’à les connaître une à une.
Oui, on trouve encore aujourd’hui des prêtres de cette envergure, des « ponts » pour la rencontre de Dieu et du monde, des sentinelles capables de laisser deviner une richesse autrement perdue.
Des prêtres comme ça, cela ne s’improvise pas : c’est le précieux travail de formation du Séminaire qui les forge, avant de les ordonner et de les consacrer à jamais des hommes de Dieu et serviteurs de son peuple. Mais il peut arriver que le temps refroidissent le généreux dévouement des débuts et coudre des pièces neuves sur un vieil habit ne servirait à rien: l’identité du prêtre, justement parce qu’elle vient d’en haut, exige de lui un cheminement quotidien de réappropriation à partir de ce qui a fait de lui un ministre de Jésus Christ.
La formation dont nous parlons c’est l’expérience permanente d’être « disciple », qui rapproche du Christ et permet de lui ressembler de plus en plus. C’est pourquoi elle ne connaît pas de fin, car les prêtres ne cessent jamais d’être des disciples de Jésus, de le suivre. Donc, la formation en tant que « disciple » accompagne toute la vie du ministre ordonné et touche toute sa personne et son ministère. Formation initiale et formation permanente sont deux moments d’une seule réalité: la marche du disciple prêtre, épris de son Seigneur et constamment sur ses pas (cf. Discours à l’assemblée plénière de la Congrégation pour le clergé, 3 octobre 2014).
Du reste, mes frères, vous savez qu’on n’a pas besoin de prêtres cléricaux, dont le comportement risque d’éloigner les gens du Seigneur, ni de prêtres fonctionnaires qui, tout en exerçant leur rôle, cherchent loin de Lui sa propre consolation.
Seuls ceux qui ont le regard fixé sur ce qui est vraiment essentiel peuvent renouveler leur « oui » au don reçu et, à chaque saison de la vie, ne jamais cesser de faire le don de leur vie ; seuls ceux qui se laissent conformer au Bon Pasteur trouvent unité, paix et force dans l’obéissance du service ; seuls ceux qui respirent sur l’horizon de la fraternité presbytérale sortent de la contrefaçon d’une conscience qui se prétend l’épicentre de tout, la seule mesure valable de ce qu’ils ressentent et font.
Je vous souhaite des journées d’écoute et de discussion qui vous aident à tracer de nouveaux itinéraires de formation permanente, capables de conjuguer ensemble les dimensions spirituelle et culturelle, les dimensions communautaire et pastorale : celles-ci sont les piliers de vies formées selon l’Evangile, gardées dans la discipline quotidienne, dans la prière, en prenant soin de ses sens et de soi, dans le témoignage humble et prophétique; des vies qui rendent à l’Eglise la confiance qu’elle a été la première à placer en elles.
Je vous accompagne de ma prière et de ma bénédiction que j’étends, par intercession de la Vierge Marie, à tous les prêtres de l’Eglise en Italie et à tous ceux qui travaillent au service de leur formation ; et je vous remercie de vos prières pour moi et pour mon ministère.